La Danse Macabre Des Femmes. (1491) Par Anonyme. D'Apres Martial d’Auvergne.(1440?-1508?) Toute hystoriee et augmentee de plusieurs personnages et beaux dictz en latin et francoys. Icy est la danse macabre des femmes toute hystoriee & augmentee de nouueaulx personnaiges auec pluseurs dis moraulx en latin et francoys qui sont enseignemens de bien viure pour bien mourir. Lex metuenda premit mortales. omnibus vna Mors cita sed dubia. nec fugienda venit. Circuit et surgens sol vitam prestat. et item. Cum cadit annichillat quod nichil ante fuit. Sic dat. sic retrahit. iterum trahet. atque retraxit Omnia. sol girans quod dedit. ipse trahit. Lacteur. Mirez vous icy mirez femmes Et mettes vostre affection A penser a voz poures ames Qui desirent saluacion Cy bas nest pas la mansion Ou vous deuez estre tousiours Mort met tout a destruction Grant & petit meurt tous les iours Pour noblesse ne pour honneur Pour richesse ou pourete Pour estre dame de valeur Ou femme de mendicite Ne differe mort equite: Mais autant dune part que dautre Sans auoir mercy ne pite Huy prent lune: et demain lautre. Ludite formose teneres cantate puelle. Nam defluunt anni more fluentis aque Nec que preteriit iterum reuocabitur vnda. Nec que preteriit hora redire potest. Le premier menestrel. Venez dames et damoiselles Du siecle & de religion Vefues: mariees & pucelles Et autres sans exception De quelconque condicion Toutes: danser a ceste danse Vous y venrez vueilles ou non Qui saige est souuent y pense. Le second. Quelz sont voz corps: je vous demande Femmes iolies tant bien paree Ilz sont pour certain la viande Quun iour sera aux vers donnee Des vers sera donc deuoree Vostre chair: qui est fresche & tendre Ia il nen demourra goulee Voz vers apres deuiendront cendre. Le tiers. Compaignon bonne est ta raison De ses femmes oultrecuidee Que leurs corps sera venaison De vers puans vng iour mengee En pourroyent elles estre gardee Pour or: argent ne rien qui soit Nenny. bien sont doncques abusees Qui ne samende il se decoit. Le quart. O femmes mirez vous en vng tas Dossemens de gens trespassez Lesquelz ont en diuers estas Au monde este leurs temps passez Et maintenant sont entassez Lun sur lautre gros et menus Ainsi serez. or y pensez La chair pourrie les os tous nus. Ex vtero natis posita est lex ire: sed esse Certos: sub sole perpetuare nichil Ex vtero natis pedetentim calle sub ipso Subdola mors comes est nos laqueare studens. La mort. Noble royne de beau corsaige Gente et ioyeuse a laduenant Iay de par le grant maistre charge De vous en mener maintenant. Et comme bien chose aduenant. Ceste danse commenceres Faictes deuoir au remenant Vous qui viuez ainsi feres. La royne. Ceste danse mest bien nouuelle Et en ay le cueur bien surprins He dieu: quelle dure nouuelle A gens qui ne sont pas aprins Las en la mort est tout comprins Royne. dame. grant ou petite Les plus grans sont les premiers prins Contre la mort na point de fuyte. La mort. Apres ma dame la duchesse Vous vien querir et pourchasser Ne pensez plus a la richesse A biens ne ioyaulx amasser Auiourdhuy vous fault trespasser Pourquoy de vostre vie est fait Folie est de tant embrasser On nemporte que le bienfait. La duchesse. Ie nay pas encore trente ans Helas: a leure que commence A scauoir que cest de bon temps Mort me vient tollir ma plaisance Iay des amis: et grant cheuance Soulas. esbas. gens a deuis Pourquoy moins me plait ceste danse Gens aises si meurent enuis. Passibus inuigilat nostris mors: omnia rodens. Nec sinit esse diu quicquid in orbe fluit Continuo cadimus viuentes. fila sororum. Atropos arrumpens emula sepe venit. La mort. Or ca ma dame la regente Qui auez renom de bien dire De danser: fringuer: estre gente Sur toutes quon scauroit eslire Vous soliez autres faire rire Festier gens et ralier: Or est il temps de vous reduire La mort fait trestout oublier. La regente. Quant me souuient des tabourins Nopces: festes: harpes: trompetes: Menestrelx: doulcines: clarins: Et des grans cheres que iay faictes Ie congnois que telz entrefaictes En temps de mort nont point de lieu Mais tournent en poures emplaites Tout se passe fors aymer dieu. La mort. Gentille femme de cheualier Que tant aymes deduit et chasse Les engins vous fault habiller Et suyure le train de ma trasse Cest bien chasse quant on pourchasse Chose a son ame meritoire Car au derrain mort tout enchasse Ceste vie est moult transitoire. La femme du cheualier. Pas si tost mourir ne cuidoye Et comment dea: je souppe hier Sur lerbe verte a la saulsoye Ou fis mon espreuier gayer En riens plus ne se fault fier Et quest ce des fais de ce monde Huy rire demain lermoyer La fin de ioye en dueil redonde. Fluctibus aut morbo. seu flammis. strage. veneno. Macra fames. calidum frigora. cura. nocent. Ergo quis in tantis possit cras dicere viuam Cum videat quotiens mors male visa ferit. La mort. Dame abbesse vous lesseres Labbaye quauez bien aymee Quun peu de bien nemporteres Plus nen seres dame appelle Vostre crosse dargent doree Vne de voz seurs portera Qui apres vous sera sacree Tout fut aultruy: tout y sera. Labbesse. Le seruice hier je faisoye En leglise comme abbesse Et ma crosse dargent portoye A matines et a la messe Et auiourduy fault que je lesse Abbaye crosse et couuent He dieu: de ce monde quest ce On est de mort sourprins souuent. La mort. Dame ploies voz gorgerettes Il nest plus temps de vous farder Voz toretz fronteaulx & bauettes Ne vous pourroient icy aider Pluseurs sont deceupz par cuider: Que la mort pour leur habit fleche Chascun il deust bien regarder Par habit mainte femme peche. La femme de lescuier. He: quay je meffait ou mesdit Dont doye souffrir telle perte Iauoye achete au landit Du drap pour taindre en escarlete: Et eusse eu vne robe verte Au premier iour de lan qui vient Mais mon emprise est descouuerte Tout ce quon pense pas nauient. Non licet vt video vane confidere vite In qua nulla fides est nisi certa mori. Finge quod aspicias morientem: sed freme: namque Consimili pena te vocat vna dies. La mort. Se vous auez sans fiction Tout vostre temps serui a dieu Du cueur en la religion Laquelle vous auoit vestue Celluy qui tous biens retribue Vous compensera loyalment A son vouloir: en temps & lieu Bienfait quiert auoir bon paiment. La prieure. Cestoit en ma religion Seruir a dieu tout mon desir En cloystre par deuocion Dire mes heures a lesir Or mest venu la mort saisir Au monde nay point de regre Face dieu de moy son plaisir Prendre doit on la mort en gre. La mort. Venez apres ma demoiselle Et serrez tous vos affiquetz Nenchault se estez laide ou belle Laisser vous fault plait & caquetz Plus ne ires a ses bancquetz Ou on sent si souef leau rose Ne verrez iouster a rouquetz Femmes font faire faire moult de chose. La demoiselle. Que me vallent mes grans atours Mes habitz. ieunesse. beaute quant tout me fault lesser en plours Oultre mon gre et voulente Mon corps sera tantost porte Aux vers et a la pourriture: Plus nen sera bale: ne chante Ioye mondaine bien peu dure. Est breuis illa dies hodie. quia forte dierum Est michi sola dies. heu metuenda dies. Atque horrenda dies. quia tunc michi meta merendi Clauditur. illa dies leta ve. dira ve dies. La mort. Et vous aussi gente bourgoise Pour neant certes vous excuses Il est force que chascun voise Comme veez. et aduises Voz beaux gorgias empesez Ny font rien. ne large sainture Maintz hommes en sont abusez En tous estatz il fault mesure. La bourgoise. Mes getz et colletz de letisses Ne me exemptent point de mort Mais mes grans ioyes et delices Me viennent icy a remort Ma conscience fort me mort Des folies faictes en ieunesse Qui me sont a rebours tresfort Ioye en la fin tourne en tristesse. La mort. Femme vefue venez auant Et vous auancez de venir. Vous veez les autres dauant Il conuient vnefoys finir Cest belle chose de tenir Lestat ou on est appellee Et soy tousiours bien maintenir Vertus est tout par tout louee. La femme vefue. Depuis que mon mary mourut Iay eu affaire grandement Sans ce que aucun me secourut Si non de dieu gard seulement Iay des enfans bien largement Qui sont ieunes et non pourueux Dont iay pitie: mais nullement Dieu ne lesse aucuns despourueux. Ortum suum queque repetunt. terramque sequuntur. Flos fluit. vmbra fugit omnia nata cadunt. Nil reputo longum. dubius quod terminus angit Crastina forte dies. est michi sola dies. La mort. Alons oultre gente marchande Et ne vous chaille de peser La marchandise quon demande Cest simplesse dy plus muser A lame deusses aduiser Le temps sen va heure apres heure: Et nest tel que den bien vser Le merite & bienfait demeure. La marchande. Qui gardera mon ouurouer Tendis que je suis a malaise Mes gens ne feront que louer Les biens leur viennent a leur aise A dieu ma balance & ma chaise Ou iay eu les yeulx diligens Pour plus cher vendre dont me poise Auarice decoit les gens. La mort. Apres ma dame la balliue Des quaquetz tenus en leglise Iugie auez par raison viue Maintes gens a la vostre guise Ie vous signifie main mise Pour pouruoir daultre en voz lieu Car auiourduy seres demise Point ne se fault iouer a dieu. La balliue. Que femme se plaint de legier La coustume nest pas nouuelle Et sentremettre de iuger Des fais dautruy & non pas delle Chascune se repute telle Que ce quelle fait est bien fait Quoncques mal ne fut dit par elle: Il nest riens au monde parfait. Proth quicunque dies sibi longos estimat: errat. Nulli est tota dies viuere tuta dies. Frustra dico dies. sit mentio nulla dierum. Cum stet nulla dies vna nec hora quies. La mort. Pour vous monstrer vostre folie: Et quon doit sur la mort veiller Sa la main espousee iolie Allons nous en deshabiller Pour vous ne fault plus traueiller Car vous viendres coucher ailleurs On ne se doit trop resueiller Les fais de dieu sont merueilleux. Lespousee. En la iournee quauoye desir Dauoir quelque ioye en ma vie Ie nay que dueil et desplaisir Et si fault que tantost deuie He mort: pourquoy as tu enuie De moy: qui me prens si acoup Si grant faulte nay desseruie Mais il fault louer dieu de tout. La mort. Femme nourrie en mignotise Qui dormez iusques au disner On va chauffer vostre chemise Il est temps de vous desieuner Vous ne deussiez iamais ieuner Car vous estes trop mesgre & vuide A demain vous viens adiourner On meurt plus tost que on ne cuide. La femme mignote. Pour dieu quon me voise querir Medecin ou appoticaire Et comment me fault il mourir Iay mary de si bon affaire Aneaulx: robes: neuf ou dix paire Ce morceau cy mest trop aigret Moult se passe tost vaine gloire Femme en ses saulx meurt a regret. Sed superest meritis mercedem sumere dignam Optima pro meritis. et viciosa paci. Aspice iudicium hoc metuendum: iudice tanto Qui vocat. et venit illa timenda dies. La mort. Doulce fille et belle pucelle Ne vous chaille ia de laisser La misere de vie mortelle Qui conuient a chascun passer Car qui vouldroit bien tout trasser Il na seurte narrest en lieu Fors son sauuement pourchasser Virginite plait bien a dieu. La pucelle vierge. En ce siecle ieune ne vieulx Ne sont pas en grant seurete De larmes sont souuent les yeulx Plains. pour ennuy ou pourete Se on a vne ioyeusete Il vient apres quinze doleurs Pour vng bien: double aduersite Plaisir mondain finit en pleurs. La mort. Nous direz vous rien de nouueau Ma dame la theologienne Du testament vieulx ou nouueau Vous veez comme je vous maine Et estes ia fort ancienne Il fait bon cecy recongnoistre Et a bien mourir mettre peine Cest beacoup que de soy congnoistre. La theologienne. Femme qui de clergie se mesle Pour auoir bruit ou quon lescoute Est des morues de petit pont Qui ont grans yeulx & ne voyent goute Saige est qui rondement si boute Et qui trop veult scauoir est bugle Le hault monter souuent cher coute Chascun en son fait est aueugle. Ergo time. te instrue. corrige mentem Viue mori presto: debita ferre para. Dum licet et spacium datur: ista relinque Pro patria celi. qua sine fine dies. La mort. Apres: nouuelle mariee Qui auez mis vostre desir A danser: & estre paree Pour festes & nopces choisir En dansant je vous vien saisir Au iourduy serez mise en terre Mort ne vient iamais a plaisir Ioye sen va comme feu de ferre La nouuelle mariee. Las: demy an entier na pas Que commence a tenir mesnage Par quoy si tost passer le pas Ne my est pas doulceur: mais raige Iauoye desir en mariage De faire mons et merueilles Mais la mort de trop pres me charge Vng peu de vent abat grant fueilles. La mort. Femme grosse prenez loisir Dentendre a vous legierement Car huy mourrez cest le plaisir De dieu & son commandement Allons pas a pas bellement En gettant vostre cueur es cieulx Et nayes peur aucunement Dieu ne fait rien que pour le mieulx. La femme grosse. Iauray bien petit de deduit De mon premier enfantement Si recommande a dieu le fruit Et mon ame pareillement Helas: bien cuidoye autrement Auoir grant ioye en ma gesine Mais tout va bien piteusement Fortune tost se change & fine. Non est illa dies cursus vt ista. dierum Est deus illa dies: vltima nostra quies. La mort. Dictes ieune femme a la cruche Renommee bonne chamberiere Respondez au moins quant on huche Sans tenir si rude maniere Vous nires plus a la riuiere Bauer: au four na la fenestre Cest cy vostre iournee derniere Aussi tost meurt seruant que maistre. La chamberiere. Quoy: ma maistresse ma promis Me marier & des biens faire Et puis si ay dautres amys Qui luy aideront a parfaire He: men iray je sans riens faire Ien appelle on me fait tort Aussi ne men scauroye taire Peu de gens desirent la mort. La mort. Scauez vous recommanderresse Point vng bon lieu pour moy loger: Iay bien mestier que on madresse Car nul ne me veult heberger Mais ien feray tant desloger Que on congnoistra mon enseigne Mourir fault pour vous abreger Nul ne pert que autre ne gaigne. La recommanderresse. En la mort na point damitie Et si ne fait riens pour requeste Or argent priere pitie Pour neant on sen ront la teste Qui y veult resister est beste La mort a nully ne complaist Et fault tous danser a sa feste Mourir conuient quant a dieu plaist. Retia sunt anime facundia sensus honores Quid certas ad opes. Retia sunt anime. Preter amare deum tibi nil applaudat in orbe Omnia pretereunt preter amare deum. La mort. Ma damoiselle du bon temps A tout voz anciens atours Il est de vous en venir temps Nature a en vous prins son cours Vous ne pouez viure tousiours Ie vays deuant: venez apres Et ne faictes point longz seiours Vieilles gens sont de la mort pres. La vieille damoiselle. Iay voirement mon temps passe Et ayme mieulx ainsi mourir Que receuoir ce qui est passe Et tant de miseres courir Iay veu poures gens langourir Et autres choses dont me tais Enfans: pour bien viure & mourir Il nest plus grant bien que de paix. La mort. Femme de grant deuocion Cloez voz heures & matines Et cesses contemplacion Car iamais nyres a matines Se voz prieres sont bien dignes Elles vous vauldront deuant dieu Rien ne vallent soupirs ne signes Bonne operacion tient lieu. La cordeliere. Ie remercie le createur A qui plaist de menuoyer querre En louant le bon redempteur Des biens qui ma donne sur terre Aux tentacions ay eu guerre Qui est moult forte a demener Mais il aide qui veult requerre Seruir dieu: est viure & regner. Quoniam non est in morte qui memor sit tui in inferno autem quis confitebitur tibi. Preterit ista dies nescitur origo secundi an labor. an requies sic transit gloria mundi. La mort. Femme daccueil et amiable A festier gens a plante: Acquis auez amis de table Pour parler de ioyeusete: Le temps nest tel quil a este Rien ne vault icy vacabont Parler: qui nest que vanite Ceulx qui ont le bruit ont le bont. La femme daccueil Auiourduy parens et amis Promettent et mons et merueilles Mais quant voient quon est bas mis Ilz baissent trestous les oreilles Et sont aussi sours comme fueilles Que le vent fait voler par couples Et que vallent promesses telles Vrais ne sont pas les amis doubles. La mort. Apres nourrice: vostre beau filz Nonobstant son couuertouer Et son beau bonnet a trois filz Vous ne le menrez plus iouer Deslogez vous sans delaier Car tous deux vous mourrez ensemble Vous ne poues plus cy targer La mort prent tout quant bon luy semble. La nourrice. A ceste danse fault aler Comme font les prestres au seyne Ie voulsisse bien reculer Mais je me sens la boce en laine Entre les bras: de mon alaine Cest enfant meurt depidimie. Cest grant pitie de mort soudaine Il nest qui ait heure ne demie. Ve anime peccatrici que non habet posse redeundi ad locum suum vnde exiuit quia turpia opera et delectaciones carnales impediunt eius ascensum sursum. La mort. Pas ne vous oblieray derriere Venez apres moy: sa la main Entendez plaisante bergiere On marchande cy main a main Aux champs nires plus soir ne main Veiller brebis ne garder bestes Riens ne sera de vous demain Apres les veilles sont les festes. La bergiere. Je prens congie du franc gontier Que je regrette a merueilles Plus naura chappeau deglantier Car vecy piteuses nouuelles A dieu bergiers et pastourelles Et les beaux champs que dieu fit croistre A dieu fleurs: & roses vermeilles Il fault tous obeir au maistre. La mort. Apres poure vieille aux potences Qui ne vous poues soustenir Cy bas nauez pas voz plaisences: Aussy vous en conuient venir Lautre siecle est a aduenir Ou pour vostre mal & misere Poues a grant bien paruenir Dieu recompense tout en gloire. La femme aux potences. De vieillesse ne voy mais goutte Par quoy ne crains gueres la mort Dix ans y a que iay la goutte Et maladie me grefue fort Mes amis ont le mien a tort Et nay vaillans deux blancs contens Dieu seul est tout mon reconfort Apres la pluye vient le beau temps Non ex difformitate corporis defedatur animus. sed ex putredine anime defedatur corpus. vt ait seneca. La mort Ha poure femme de village Suyues mon train sans retarder Plus ne vendres euf ne formage Alez vostre panier vuider Se vous auez bien sceu garder Pourete: pacience: et perte Vous en pourres moult amender Chascun trouuera sa deserte. La femme de village. Ie prens la mort vaille que vaille Bien en gre et en pacience Frans archiers ont pris ma poullaille Et eu toute ma substance De poures gens nulluy nen pense Entre voisins na charite Chascun veult auoir grant cheuance Nul na cure de pouurete. La mort. Et vous ma dame la gourree Vendu auez maintz surplis Donc de largent estes fourree Et en sont voz coffres remplis Apres tous souhaitz acomplis Conuient tout laisser et bailler Selon la robe on fait le plis A tel potaige tel cuiller. La vieille. A tout mon cas bien recongnoistre. Ie nay pas vescu sans reprouche: Me suis affuble de mon maistre Comme fait coquin de sa pouche: Iay souuent mis ses vins en broche Et lay fait despendre a ma guise Mais maintenant la mort maproche Tant va le pot a leau qui brise. Omnium mortalium cura quamuis multiplicium studiorum labor exerceat diuerso quidem calle ad vnum tamen beatitudinis finem nititur peruenire Boetius. La mort. Approuches vous reuenderesse Sans plus cy faire demouree Vostre corps: nuyt et iour ne cesse. De gaigner pour estre honnouree. Honneur est de poure duree Et se part en vng moment deure Au monde na chose assuree Tel rit au matin qui au soir pleure. La reuenderesse. Iauoie hier gaignie deux escus Pour sourfaire subtilement: Mais ne scay qui les ma tollus Argent acquis mauuesement Ne fait ia bien communement Helas je meurs cest dautre metz. Que prestre aye hatiuement Car il vault mieulx tart que iamais. La mort. Femme de petite value Mal viuant en charnalite Mene aues vie dissolue En tous temps yuer et este Aies le cueur espouente. Car vous seres de pres tenue Pour mal faire on est tourmente Pechie nuist quant on continue. La femme amoureuse. A ce pechie me suis soubzmise Pour plaisance desordonnee Pendus soient ceulx qui my ont mise Et au mestier habandonnee Las se ieusse estoy bien menee. Et conduite premierement Iamais ny eusse estoy tournee. La fin suyt le commencement. Noli per cras cras tibi longas ponere methas Per cras cras cras cras omnis consumitur etas. Est homo res fragilis et durans tempore paruo Posset esse similis flori qui crescit in aruo. La mort. Venez ca garde dacouchees Dresse auez maintz baingz perdus Et ses courtines attachees Ou estoient beaux boucques pendus: Bien y ont estez despendus Tant de motz ditz que cest vng songe Qui seront apres cher vendus En la fin tout mal vient en ronge. La garde dacouchees. Iay voirement dresse maintz baingz Pour les comperes et commeres: Ou sont estez pates de coingz Menges. darioles. goyeres Tartes. et fait mille grans cheres Si tost quon a oste la table Il nen souuient a nulluy gueres Ioye de menger est peu durable. La mort. Tires vous pres gente garsette Bailles moy vostre bras menu Il faut que sur vous la main mette Vostre derrain iour est venu Mort nespargne gros ne menu Grant ou petit: luy est tout vng Paier on doit de tant tenu La mort est commune a chascun. La jeune fille. Haa ma mere je suis happee Vecy la mort qui me transporte Pour dieu quon garde ma poupee Mes cinq pierres ma belle cote Ou elle vient trestout emporte Par le pouuoir que dieu luy donne: Vieux et ieunes de toute sorte Tout vient de dieu tout y retorne. Quid fetidius humano cadauere. quid horribilius femina mortua Cuius gratissimus erat amplexus in vita molestus erit eciam aspectus in morte. La morte. Suyues mon train religieuse De voz fais conuient rendre compte Se point nauez este piteuse Aux poures: ce vous sera honte En paradis point on ne monte Fors par degrez de charite Entendes bien a vostre compte Tout ce quon fait y est compte. La religieuse. Iay fait par tout ce que iay peu Aux poures selon leur venue Les malades pense: & repeu Non si bien que iestoye tenue Mais se faulte il est aduenue Dieu me pardonne la defaille Sa grace tousiours retenue Il nest si iuste qui ne faille. La morte. Oyez oyez: on vous fait scauoir Que ceste vieille sorciere A fait mourir et deceuoir Plusieurs gens en mainte maniere Est condamnee comme meurtriere A mourir ne viura plus gaire Ie la maine en son cymitiere Cest belle chose de bien faire. La sorciere. Mes bonnes gens ayes pitie De moy: et toute pecheresse Et me donnes par amitie Don de patenostre ou de messe Iay fait du mal en ma ieunesse Dont icy achete la prune Si pries dieu que lame adresse Nul ne peut contre sa fortune. Si quis sentiret quo tendit et vnde veniret Nunquam gauderet sed omni tempore fleret. La mort. Dieu ayme bien femmes deuotes Qui ont consciences nettes Et hait sur tout les bigotes Aux chaperons sans cornetes Comme aucunes seurs colletes Lesquelles par ypocrisie En secretz pechez sont infectes Deuant dieu & sa compaignie. La bigote. Pour verite me suis monstree Souuent meilleur que je nestoye Aucuneffoiz bien desieunee Faisant semblant que je ieunoye Et de ma bouche barbetoye Sans dire ne mot ne lettre Ie pry a dieu quen bonne voye Plaise ma poure ame mettre. La mort. Sus tost margot venez auant Estes vous maintenant derriere Vous deussiez ia estre deuant Et danser toute la premiere Quel contenance: quel maniere Ou est vostre fille marote Ne vault faire cy mesgre chiere Car cest vostre derniere note. La sotte. Entre vous coinctes & iolies Femmes oyez que je vous dis Laissez a heure voz folies Car vous mourrez sans contredis Si iay ne meffait ne mesdis A ceulx qui demeurent/ pardon Requiers/ et a dieu paradis Demander ne puis plus beau don. Vermibus hic donor et sic ostendere cogor Qualiter hic ponor ponitur omnis honor. Vt placet in longum vite spem temporis auge Ex nichilo nichilum mox erit atque nichil Mille fuere viri milleni milia mille Corpus humo putruit: nomine fama caret. La royne morte. Ie estoye royne couronnee Plus que autre doubtee & crainte Qui suis icy aux vers donnee Apres que de mort fus attainte Sur la terre je suis contrainte Destre couchee a la renuerse Pour quoy est dure ma complainte Bien charje droit qui ne verse. Prenez y qui me regardez Exemple: pour vostre prouffit Et de mal faire vous gardes Ie nen dis plus il me souffit Si non: car celluy qui vous fit Quant il vouldra vous defera Defais estiez quant vous refit Qui bien fera bien trouuera. Lacteur. O vous seigneurs & aussi dames Qui contemplez ceste paincture Plaise vous prier pour les ames De ceulx qui sont en sepulture De mort neschappe creature Allez: venez: apres mourres Ceste vie quun bien peu ne dure Faictes bien vous le trouueres Iadis furent comme vous estes Qui ainsi dansent en facon telle Allans parlans comme vous faictes De gens mors il nest plus nouuelle Ne il nen chault dune senelle Aux hoirs ne amis des trespasses Mais quilz ayent argent & vaisselle Ayes deulx pitie: cest asses. Puis que ainsi est que la mort soit certaine Plus que autre rien terrible & douloureuse Et que chose ne peut estre incertaine Puis que en est leure horrible & angoysseuse Et soit si briefue & par tant perilleuse Las nostre vie en ceste valee miserable Il mest aduis pour le plus conuenable Que nous deuons du tout entierement Mettre soub pie ce monde decepuable Pour bien mourir et viure longuement Delaisser doit toute ioye mondaine Et mener vie humble & religieuse Qui monter veult a la tressouueraine Cite des cieulx qui tant est glorieuse La contempler doit tousiours lame eureuse Qui ayme dieu & hait euure de diable Suiure les bons estre a tous charitable Soy confesser souuent deuotement Et messe ouyr qui tant est prouffitable Pour bien mourir et viure longuement Trop sabuse homme qui demaine Orgueil en luy et vie ambicieuse Quant il scet bien que la mort tout emmaine Qui vient souuent soudaine & merueilleuse Mais doit penser la passion piteuse Du redempteur et la peine doubtable Denfer sans fin qui est inenarrable Le iour hatif du diuin iugement Et ses pechez: comme saige & notable Pour bien mourir et viure longuement Mortelle femme: & ame raisonnable Se apres ne veulx mort estre damnable Tu dois le iour vne foys seulement Penser du moins ta fin abhominable Pour bien mourir et viure longuement. Ie congnois que dieu ma forme Et fait en sa digne semblance Ie congnois que dieu ma donne Ame sens vie et congnoissance Ie congnois qua iuste balance Selon mes fais iuge seray Ie congnois moult: mais je ne scay Congnoistre dont vient la folie Que je scay bien que je mourray Et si namende point ma vie. Ie congnois en quel pourete vins sur terre et nasqui denfance je congnois que dieu ma preste tant de biens en grant habondance je congnois quauoir ne cheuance auecques moy nemporteray je congnois que tant plus auray plus dolent mourray en partie je congnois tout cecy pour vray et si namende point ma vie. Ie congnois que iay ia passe grant part de mes iours sans doubtance je congnois que iay amasse pechez et fait peu penitence je congnois que par ignorence excuser je ne me pourray je congnois que trop tart vendray quant lame sera departie pour dire je mamenderay et si namende point ma vie. Prince je suis en grant esmay de moy qui les autres chastie et moy mesmes le pire fay et si namende point ma vie. Et cum aperuisset sigillum quartum Audiui vocem quarti animalis. dicentis. Veni et vide. Et ecce equus pallidus et qui sedebat super eum nomen illi mors et infernus sequebatur eum. Et data est illi potestas super quattuor partes terre interficere gladio. fame. et morte. Apocalipsis quarto capitulo. Quoniam non est in morte qui memor sit tui in inferno autem quis confitebitur tibi. Sur ce cheual hideux et palle La mort suis: Fierement assise Il nest beaulte que je ne haale Soit vermeille ou blanche ou bise Mon cheual court comme la Bise Et en courant mort rue et frappe Et je tue tout. Car cest ma guise Tous viuans trebuchent en ma trappe. Je passe par mons et par vaulx Sans tenir ne voie ne sente Ie prens par villes et chasteaulx Mon tribu mon cens ma rente. Sans donner delay nattente ne iour. ny heure. ne demie Deuant moy fault quon se presente A tous viuans je tol la vie. Enfer scait bien quel tuerie Ie fais de gens. car pas a pas Me suit. Et de ma Boucherie Aual lan fais maint gros repas. Quant je besoingne il ne dort pas Par moy attent que proie aura Daucuns qui ne sen doubtent pas Sen garde qui garder vouldra. Encor me suyt raison pour quoy De ceulx qui meurent de mon dart Et sont sans nombre: Croies moy. Car il en a la plus grant part Paradis nen a mie le quart Ne la disme on luy feroit tort Grant. sil nauoit tout au plus tart Lomme pescheur quant il est mort. Ie considere ma pouure humanite Et comme en pleur premier nasqui sur terre Ie considere moult ma fragilite Et mon peche qui tropt le cuer me serre Ie considere que mort me viendra querre Ie ne scay lheure. pour me tollir la vie Ie considere que lennemy mespie La chair: le monde. me guerroient si tresfort Ie considere que cest tout par enuie Pour moy liurer sans fin de mort a mort. Ie considere les tribulacions De ce vil siecle dont la vie nest pas necte Ie considere cent mille passions Ou poure humaine creature est subiecte Ie considere la sentence parfaicte Du vray iuge faicte sur bons et maulx Ie considere tant plus viz que pis vaulx Dont conscience bien souuent me remort Ie considere des damnes les deffaulx Qui sont liures sans fin de mort a mort. Ie considere que les vers mangeront Mon dolent corps cest chose espouentable Ie considere las pecheurs que feront Quant se viendra le iugement doutable O doulce vierge sur toutes delectable Ayez mercy de moy celle iournee Qui tant sera merueilleuse et doubtee Et ma poure ame conduisez a droit port Car a vous seule du cuer je lay vouee Pour la deffendre sans fin de mort a mort. Prince du ciel vostre humble creature Vous cry mercy pour faire son accord Et de la peine qui a tousiours mais dure La deffendez sans fin de mort a mort. Cy finist la danse macabre des femmes toute hystoriee et augmentee de plusieurs personnages et beaux dictz en latin et francoys. Imprimee A Paris par Guyot Marchant demorant ou grant hostel du champ gaillard derrier le college de nauarre Lan de grace mil quatre cens quatre vingz et vnze Le second iour de may Guyot marchant imprimeur demorant ou grant hostel de nauarre en champ gaillart a paris Source: http://www.poesies.net