Poesies. par Boris Vian. (1920-1959) TABLE DES MATIERES. POEMES. Le Fond De Mon Coeur. V Comme Vian. Qu’y a-t-il? La vie, c’est comme une dent... Tout a été dit cent fois... Je veux une vie en forme d’arête... Pourquoi que je vis... Je voudrais pas crever... Si les poètes étaient moins bêtes... Je mourrai d'un cancer de la colonne vertébrale... L'Evadé. CHANSONS. Le Deserteur. Cet été. A Comme Anatole. B Comme Berthe. C Comme Celestin. D Comme Desiré. E Comme Eugene. F Comme Francois. G Comme Gaston. H Comme Henri. I Comme Irma. J Comme Joseph. K Comme Kleber. L Comme Louis. M Comme Marcel. N Comme Nicolas. O Comme Oscar. P Comme Pierre. Q Comme Quintal. R Comme Raoul. S Comme Suzanne. T Comme Therese. U Comme Ursule. V Comme Victor. W Comme William. X Comme Xavier. Y Comme Yvonne. Z Comme Zoe. A L'école De L'Amour. A La Manière De Brassens. A La Pêche Des Coeurs... A La Plage. A Tous Les Enfants. Ah Si j Avais Un Franc Cinquante... Barcelone. Pour Jean Martin. Bourrée De Complexes. Ce N'est Que L'ombre D'un Nuage... Chantez! Cinématographe. Fais Moi Mal Johnny. Huit Jours En Italie. J'suis snob... Je bois... L'Ame Slave. L'Année A L'Envers. La Complainte De Mackie. La Complainte Du Progrès. La Java Des Bombes Atomiques. La Java Des Chaussettes A Clous. La Java Martienne. La Malédiction Des Balais. La Marche Des Gosses. La Valse Jaune. Le Petit Commerce. Les Jardins De Banlieue. Les Joyeux Bouchers. Mozart Avec Nous. Ne vous mariez pas les filles... On N'est Pas Là Pour Se Faire Engueuler. Quand j'aurai du vent dans mon crâne... Rue Traversière. La Valse Des Mannequins. Y'en A Qui Ont Des Trompinettes... Le Fond De Mon Coeur. À moi Je vais être sincère -une fois n’est pas coutume - Voilà: Je serai content quand on dira Au téléphone -s’il y en a encore Quand on dira V Comme Vian. J’ai de la veine que mon nom ne commence pas par Q Parce que Q comme Vian, ça me vexerait. Qu’y a-t-il? A Jacques Prévence. Premièrement: il y a beaucoup de mérite à épouser une femme plus jeune que soi Il y a beaucoup de mérite à épouser une femme Il y a beaucoup de mérite Sans compter les emmerdements. Deuxièmement: Il y a beaucoup de mérite à épouser une femme plus vieille que soi Il y a beaucoup de mérite à épouser une femme Il y a beaucoup de mérite à épouser Il y a beaucoup de mérite Sans compter qu’il y a des emmerdements. Troisièmement: Il y a beaucoup d’emmerdements Sans compter le mérite d’épouser une femme. La vie, c’est comme une dent... La vie, c’est comme une dent D’abord on n’y a pas pensé On s’est contenté de mâcher Et puis ça se gâte soudain ça vous fait mal et on y tient Et on la soigne et les soucis Et pour qu’on soit vraiment guéri Il faut vous l’arracher, la vie Tout a été dit cent fois... Tout a été dit cent fois Et beaucoup mieux que par moi Aussi quand j’écris des vers C’est que ça m’amuse C’est que ça m’amuse C’est que ça m’amuse et je vous chie au nez. Je veux une vie en forme d’arête... Je veux une vie en forme d’arête Sur une assiette bleue Je veux une vie en forme de chose Au fond d’un machin tout seul Je veux une vie en forme de sable dans des mains En forme de pain vert ou de cruche En forme de savate molle En forme de farifondaine De ramoneur ou de lilas De terre plaine de cailloux De coiffeur sauvage ou d’édredon fou Je veux une vie en forme de toi Et je l’ai, mais ça ne me suffit pas encore Je ne suis jamais content Pourquoi que je vis... Pourquoi que je vis Pourquoi que je vis Pour la jambe jaune D’une femme blonde Appuyée au mur Sous le plein soleil Pour la voile ronde D’un pointu du port Pour l’ombre des stores Le café glacé Qu’on boit dans un tube Pour toucher le sable Voir le fond de l’eau Qui devient si bleu Qui descend si bas Avec les poissons Les calmes poissons Ils paissent le fond Volent au-dessus Des algues cheveux Comme zoiseaux lents Comme zoiseaux bleus Pourquoi que je vis Parce que c’est joli Je voudrais pas crever... Je voudrais pas crever Avant d’avoir connu Les chiens noirs du Mexique Qui dorment sans rêver Les singes à cul nu Dévoreurs de tropiques Les araignées d’argent Au nid truffé de bulles Je voudrais pas crever Sans savoir si la lune Sous son faux air de thune A un côté pointu Si le soleil est froid Si les quatre saisons Ne sont vraiment que quatre Sans avoir essayé De porter une robe Sur les grands boulevards Sans avoir regardé Dans un regard d’égout Sans avoir mis mon zobe Dans des coinstots bizarres Je voudrais pas finir Sans connaître la lèpre Ou les sept maladies Qu’on attrape là-bas Le bon ni le mauvais Ne me feraient de peine Si si si je savais Que j’en aurai l’étrenne Et il y a z aussi Tout ce que je connais Le fond vert de la mer Où valsent les brins d’algue Sur le sable ondulé L’herbe grillée de juin La terre qui craquelle L’odeur des conifères Et les baisers de celle Que ceci que cela La belle que voilà Mon Ourson, l’Ursula Je voudrais pas crever Avant d’avoir usé Sa bouche avec ma bouche Son corps avec mes mains Le reste avec mes yeux J’en dis pas plus faut bien Rester révérencieux Je voudrais pas mourir Sans qu’on ait inventé Les roses éternelles La journée de deux heures La mer à la montagne La montagne à la mer La fin de la douleur Les journaux en couleur Tous les enfants contents Et tant de trucs encore Qui dorment dans les crânes Des géniaux ingénieurs Des jardiniers joviaux Des soucieux socialistes Des urbains urbanistes Et des pensifs penseurs Tant de choses à voir A voir z et à entendre Tant de temps à attendre A chercher dans le noir Et moi je vois la fin Qui grouille et qui s’amène Avec sa gueule moche Et qui m’ouvre ses bras De grenouille bancroche Je voudrais pas crever Non monsieur non madame Avant d’avoir tâté Le goût qui me tourmente Le goût qu’est le plus fort Je voudrais pas crever Avant d’avoir goûté La saveur de la mort... Si les poètes étaient moins bêtes... Si les poètes étaient moins bêtes Et s'ils étaient moins paresseux Ils rendraient tout le monde heureux Pour pouvoir s'occuper en paix De leurs souffrances littéraires Ils construiraient des maisons jaunes Avec des grands jardins devant Et des arbres pleins de zoizeaux De mirliflûtes et de lizeaux Des mésongres et des feuvertes Des plumuches, des picassiettes Et des petits corbeaux tout rouges Qui diraient la bonne aventure Il y aurait de grands jets d'eau Avec des lumières dedans Il y aurait deux cents poissons Depuis le croûsque au ramusson De la libelle au pépamule De l'orphie au rara curule Et de l'avoile au canisson Il y aurait de l'air tout neuf Parfumé de l'odeur des feuilles On mangerait quand on voudrait Et l'on travaillerait sans hâte A construire des escaliers De formes encor jamais vues Avec des bois veinés de mauve Lisses comme elle sous les doigts Mais les poètes sont très bêtes Ils écrivent pour commencer Au lieu de s'mettre à travailler Et ça leur donne des remords Qu'ils conservent jusqu'à la mort Ravis d'avoir tellement souffert On leur donne des grands discours Et on les oublie en un jour Mais s'ils étaient moins paresseux On ne les oublierait qu'en deux. Je mourrai d'un cancer de la colonne vertébrale... Je mourrai d'un cancer de la colonne vertébrale Ça sera par un soir horrible Clair, chaud, parfumé, sensuel Je mourrai d'un pourrissement De certaines cellules peu connues Je mourrai d'une jambe arrachée Par un rat géant jailli d'un trou géant Je mourrai de cent coupures Le ciel sera tombé sur moi Ça se brise comme une vitre lourde Je mourrai d'un éclat de voix Crevant mes oreilles Je mourrai de blessures sourdes Infligées à deux heures du matin Par des tueurs indécis et chauves Je mourrai sans m'apercevoir Que je meurs, je mourrai Enseveli sous les ruines sèches De mille mètres de coton écroulé Je mourrai noyé dans l'huile de vidange Foulé aux pieds par des bêtes indifférentes Et, juste après, par des bêtes différentes Je mourrai nu, ou vêtu de toile rouge Ou cousu dans un sac avec des lames de rasoir Je mourrai peut-être sans m'en faire Du vernis à ongles aux doigts de pied Et des larmes plein les mains Et des larmes plein les mains Je mourrai quand on décollera Mes paupières sous un soleil enragé Quand on me dira lentement Des méchancetés à l'oreille Je mourrai de voir torturer des enfants Et des hommes étonnés et blêmes Je mourrai rongé vivant Par des vers, je mourrai les Mains attachées sous une cascade Je mourrai brûlé dans un incendie triste Je mourrai un peu, beaucoup, Sans passion, mais avec intérêt Et puis quand tout sera fini Je mourrai. L'Evadé. Il a dévalé la colline Ses pieds faisaient rouler des pierres Là-haut, entre les quatre murs La sirène chantait sans joie Il respirait l'odeur des arbres De tout son corps comme une forge La lumière l'accompagnait Et lui faisait danser son ombre Pourvu qu'ils me laissent le temps Il sautait à travers les herbes Il a cueilli deux feuilles jaunes Gorgées de sève et de soleil Les canons d'acier bleu crachaient De courtes flammes de feu sec Pourvu qu'ils me laissent le temps Il est arrivé près de l'eau Il y a plongé son visage Il riait de joie, il a bu Pourvu qu'ils me laissent le temps Il s'est relevé pour sauter Pourvu qu'ils me laissent le temps Une abeille de cuivre chaud L'a foudroyé sur l'autre rive Le sang et l'eau se sont mêlés Il avait eu le temps de voir Le temps de boire à ce ruisseau Le temps de porter à sa bouche Deux feuilles gorgées de soleil Le temps de rire aux assassins Le temps d'atteindre l'autre rive Le temps de courir vers la femme Il avait eu le temps de vivre. CHANSONS. Le Deserteur. Monsieur le président Je vous fais une lettre Que vous lirez peut-être Si vous avez le temps. Je viens de recevoir Mes papiers militaires Pour partir à la guerre Avant mercredi soir. Monsieur le président Je ne veux pas la faire Je ne suis pas sur terre Pour tuer de pauvres gens. C'est pas pour vous fâcher, Il faut que je vous dise, Ma décision est prise, Je m'en vais déserter. Depuis que je suis né, J'ai vu mourir mon père, J'ai vu partir mes frères Et pleurer mes enfants. Ma mère a tant souffert Qu'elle est dedans sa tombe Et se moque des bombes Et se moque des vers. Quand j'étais prisonnier, On m'a volé ma femme, On m'a volé mon âme, Et tout mon cher passé. Demain de bon matin Je fermerai ma porte Au nez des années mortes, J'irai sur les chemins. Je mendierai ma vie Sur les routes de France, De Bretagne en Provence Et je dirrai aux gens: «Refusez d'obéir, Refusez de la faire, N'allez pas à la guerre, Refusez de partir.» S'il faut donner son sang, Allez donner le vôtre, Vous êtes bon apôtre Monsieur le président. Si vous me poursuivez, Prévenez vos gendarmes Que je n'aurai pas d'armes Et qu'ils pourront tirer. (1) Cet été. Quand vous recevrez Ce petit billet Ma chérie, ne le flanquez pas au panier Ma lettre vous invite A ma suivre bien vite A Cannes Pendant l'été Lorsque la Croisette En grande toilette Devant nous fera briller ses feux follets Je veux que votre épaule Soit contre mon épaule A Cannes Cet été Tant d'étoil's sur terre et tant de fleurs au ciel Tout ça avec vous Ça me rendra fou Nous irons danser et nous irons traîner En passant le temps à s'aimer Quand vous recevrez Ce petit billet Ma chérie, dites-moi que vous acceptez Puisque je vous invite A me suivre bien vite Oh... venez Venez à Cannes Cet été A Comme Anatole. Anatole avait un âne Anatole avait un âne Qui aimait les ananas Qui aimait les ananas Les abricots les abricot Les artichauts les artichauts Et tout c'qui commencait par A Anatole Anatole Quel drôle de gars Ah ah ah B Comme Berthe. Berthe met ses bas et son bonnet brodé Et se balade au bal Pour danser la bourrée Berthe est belle et blonde Elle aime le beau Bastien Qui a des bottes, bottes, bottes Et qui bondit si bien C Comme Celestin. Célestin mange des carottes Dans le champs de choux D'la cuisine Charlotte Célestin change de chapeau Car il est coquet comme un coqueliquot D Comme Desiré. Désiré reçoit dix ducats Des domestiques du Duc de Dondaine Car il a vendu deux dadas A la duchesse et le duc les lui doit E Comme Eugene. Eugène épluche des épinards Eugène épluche des épinards Et les entasse dans l'entonnoir Les épinards s'enfoncent et tombent Et la maman s'étonne et gronde Eh, eh c'est effrayant Es-tu étourdi mon enfant F Comme Francois. François et ses frères font gaiement La farandole, la farandole Autour d'un feu De fagots flambants La farandole, c'est fatiguant La farandole, c'est fatiguant G Comme Gaston. Gaston goûte un gâteau Garni de grains de groseilles Gaston se gave trop Gaston sera très gras et gros H Comme Henri. En haut de sa hutte S'est hissé Henri En haut de sa hutte S'est hissé Henri Que la lune est haute Se dit notre ami Que la lune est haute Henri est hardi I Comme Irma. Irma ira dans l'Ile Y chercher des iris Digue donda dondaine Et des petites fleurs de lys Et des volubilis J Comme Joseph. Joseph joue au Jacquet Avec le jeune John Dans le joli jardinet Plein de jacynthes jaunes Une pie qui passe Joyeuse jacasse Joyeuse jacasse Jouons, jouez Dans le joli jardinet K Comme Kleber. As-tu connu Kléber, Kléber, Avec son képi sur la tête As-tu connu Kléber, Kléber, Et son kangourou jaune et vert Kléber, Kléber Quand il marchait des kilomètres Kléber, Kléber Avec son Képi qu'il est fier L Comme Louis. Louis lit un livre Où il y a des lions, des lionnes Des loups, des lacs, des lapons Des laponnes Et des gauchos Qui lancent le lasso Sur de longues licornes M Comme Marcel. Marcel monte sur sa moto Et va au marché Vendre des mirabelles Marcel monte sur sa moto Un matin de mai Avec son marmot N Comme Nicolas. Nicolas a fait naufrage Va-t'il se noyer Nicolas a fait naufrage Va-t'il se noyer Non, non, non Nicolas nage On voit son nez qui surnage Qui surnage Oh, oh, oh Le pauvre nigaud O Comme Oscar. Oh mon oncle Oscar Mange des oeufs comme un ogre De bons oeufs au lard Obèse il sera plus tard Oh mon oncle Oscar Mange des oeufs comme un ogre De bons oeufs au lard Obèse il sera plus tard Oh mon oncle Oscar Mange des oeufs comme un ogre De bons oeufs au lard Obèse il sera plus tard Obèse il sera plus tard P Comme Pierre. Pierre est parti pour le Pérou Par le pétrolier du Poitou Pour payer son passage il a Pris dans l'équipage un emploi Il pêche du poisson Sur le pont Pont, pont, pont Pour compléter les provisions Q Comme Quintal. Quintal aura quatre ans Quand les quetsches seront mûres Que va-t-on lui donner Un jeu de quilles Un bilboquet R Comme Raoul. Raoul recherche un rat Qui a rongé le raisin Raoul recherche un rat Qui a rongé le raisin Mais le rat rit et ronge Rencogné dans le foin Rongeur reste à la grange Le ratier n'est pas loin Le ratier n'est pas loin S Comme Suzanne. Suzanne a sept paires de souliers Six pour la s'maine Plutôt simplet la septième en satin broché Sertie de saphirs beau sire Pour aller danser T Comme Therese. Thérèse titubante Tombe et se tord le nez Thérèse titubante Tombe et se tord le nez Thérèse dit sa tante T'as tord de trop trinquer Tu vas téter des tisanes Mon tonneau t'as trop tentée U Comme Ursule. Ursule est dans une usine Où l’on fait des U Le couvent des ursulines En prend deux on le devine U, u, u, u, u, u Vraiment c’est utile un U V Comme Victor. L'vieux Victor Vend des véhicules Des voitures où bien des vélos L'vieux Victor Dans son vestibule Voit venir vingt-cinq vagabonds Qui veulent tous, oui, oui, oui Qui veulent tous, non, non, non Des voitures et pas des violons Qui veulent tous, oui, oui, oui Qui veulent tous, non, no,n non Voyager par monts et vallons W Comme William. Le petit William A été bien sage Il part en vacances Dans un beau wagon Le petit William A été bien sage Il part en vacances Dans un beau wagon Quant à Xavier Il joue sur la plage Du xylophone Pour les p'tits poissons X Comme Xavier. Quant à Xavier Il joue sur la plage Du xylophone Pour les p'tits poissons Y Comme Yvonne. Yvone a chipé Le yo-yo d'Yvette Qui mange un yaourt Derrière la maison Yvone a chipé Le yo-yo d'Yvette Qui mange un yaourt Derrière la maison Yvone a chipé Le yo-yo d'Yvette Qui mange un yaourt Derrière la maison Z Comme Zoe. Zoé avait un zèbre Un peu zazou Et plein de zèle Il s'appelait zizi Et zigzaguait En zézayant Zoé avait un zèbre Un peu zazou Et plein de zèle Il s'appelait zizi Et zigzaguait En zézayant A L'école De L'Amour. A l'école de l'amour L'professeur à tant de charme Que j'y accours chaque jour Pour profiter de ses cours A l'école de l'amour Lorsque j'arrive après l'heure Main de fer, gant de velours Il me punit sans recours. Vous me copierez cent fois "je t'aime", Ce soir après la leçon Ne discutez pas, c'est le barème Pour les filles et les garçons. Vous me copierez cent fois "je t'aime" Et pour que ce soit plus long Je vous forcerai peut être même A me suivre à la maison. A l'école de l'amour On apprend tellement vite Que les cours paraissent courts Passés à faire la cour. A l'école de l'amour L'professeur est tout sourire Mais si on s'perd en discours Tout son sang ne fait qu'un tour. Vous me copierez cent fois "je t'aime", Ce soir après la leçon Vous ne savez pas vos théorèmes Je vous ai dit "de l'action". Vous me copierez cent fois "je t'aime" Et si vous y prenez goût Je vous montrerez peut être même Quelques tours jolis comm' tout. A l'école de l'amour J'ai gagné un beau diplôme Et maintenant c'est mon tour De faire payer mes cours. A l'école de l'amour Quand mon élève résiste Je le punis quelques jours Et ça réussit toujours. Vous me copierez cent fois "je t'aime" Et si ça ne suffit pas Pour vous rendr' un peu plus fort en thème Je vous garderai chez moi. Vous me copierez cent fois "je t'aime" Et quand vous aurez fini Je vous forcerai peut être même A me suivre dans ma vie A me suivre dans ma vie... A La Manière De Brassens. Je me promenais dans la rue gué O gué Quand devant moi je l'aperçus O gué O gué Elle était jeune et court vêtue Et son dos valait d'être vu Je me suis dit Putain la belle créature Et comme je vénère les fruits de la nature Je lui ai proposé un p'tit tour en voiture Cornegidouille Sous un corsage tendu comme ça O gué O gué On se demande comment son coeur bat O gué O gué Poussé par la curiosité scien-tifiique Je me suis mis en devoir d'enlever l'élastique Et fus récompensé par un spectacle uniique Cornegidouille De ces deux pommes mamelues O gué O gué Je me suis vraiment régalu O gué O gué A La Pêche Des Coeurs... A la pêche des coeurs, je ne veux plus aller Je ne veux plus, ma mère Y en a trop de douleur quand l'amour s'envoler Et laisser pauvre gars qui pleure Ma cocotte elle est partie Avec un vilain bonhomme Je suis seul toute la nuit Pas possible de faire un somme A la pêche des coeurs, je ne veux plus aller Je ne veux plus, ma mère Y en a fini de bonheur quand l'amour s'envoler Et laisser larmes amères Au bistro d'oncle Fernand C'est l'calypso qui commence Je vais passer un instant Mais je resterai sur mon banc A la pêche des coeurs, je voulais plus aller Seigneur la belle fille Elle a les lèvres roug' et des grands yeux qui brillent Je crois pas que je la connais Voulez-vous danser, mam'zelle Pour consoler un pauvre homme Mais monsieur je suis pucelle Mamoiselle, soyez bonne A la pêche des coeurs, je voulais plus aller Mais vous êtes très jolie Et si je vous le dis ce n'est pas un péché C'est la vérité, ma mie Suivez-moi sous les palmiers Mon Dieu quelle jolie robe Il vaudrait mieux l'enlever Pour ne pas risquer d'la gâter A la pêche des coeurs, je ne veux plus aller Mais dites-moi, friponne Où vous avez trouvé ces beaux petits tétés Et ce corps qui s'abandonne Donnez un baiser, ma mie Pour faire plaisir au pauvre homme Restons là toute la nuit Ma douleur elle est partie A la pêche des coeurs, je ne veux plus aller Car j'ai fait bien belle prise Elle vient d'enlever sa petite chemise Et je vais me régaler... Et je vais me régaler... Et je vais me régaler... A La Plage. Vivent les vacances, vive le ciel bleu, vive, vive la joie Vivent les crevettes, on va faire trempette, c'est drôle et ça nettoie Ouah ! Puisqu'il fait si chaud par ce beau jour d'été Profitons-en Pour nous baigner dans L'océan salé où c'est si bon De se tremper les pieds pour faire peur aux poissons ! Oh ! Dans le sable fin on joue aux quatre coins Sous l’oeil luisant D'un vieux malin qui Lorgne les fillettes en f'sant semblant De r'garder les bébés faire des pâtés Sur le phonographe on met un charleston Et l'on se trémousse aux accents du trombone Un petit saut par-ci Un petit saut par -là Doo da doo da doo da La plage est en fête on rit comme des fous On rit encore plus en buvant un bon coup Un verr' de gin par-ci Un verr' de gin par-là Ça ira mieux comme ça ! Sous le grand soleil on s'élance dans l'eau Pour jouer au Water polo Et Ceux qui ne jouent pas restent au bord Pour se conter fleurette, ils n'ont pas tort Vivent les vacances, vive le ciel bleu, vive, vive la joie Vivent les crevettes, on va faire trempette, tant pis si on s'noie ! La la la la la lalala la L'azur nous enivre Nous voulons vivre Au bord de l'eau La la la la la lalala la Le sel de la mer nous conservera toujours vert A Tous Les Enfants. A tous les enfants qui sont partis le sac au dos Par un brumeux matin d'avril Je voudrais faire un monument A tous les enfants qui ont pleuré le sac au dos Les yeux baissés sur leurs chagrins Je voudrais faire un document Pas de pierre, pas de béton, ni de bronze qui devient vert sous la morsure aiguë du temps Un monument de leur souffrance Un monument de leur terreur Aussi de leur étonnement Voilà le monde parfumé, plein de rires, plein d'oiseaux bleus, soudain griffé d'un coup de feu Un monde neuf où sur un corps qui va tomber grandit une tache de sang Mais à tous ceux qui sont restés les pieds Au chaud, sous leur bureau en calculant Le rendement de la guerre qu'ils ont voulue A tous les gras, tous les cocus qui ventripotent dans la vie et comptent et comptent leurs écus A tous ceux-là je dresserai le monument qui leur convient avec la schlague avec Le fouet, avec mes pieds, avec mes poings Avec des mots qui colleront sur leurs Faux-plis, sur leurs bajoues, des marques De honte et de boue. Ah Si j Avais Un Franc Cinquante... Ah ! Si j'avais un franc cinquante J'aurais bientôt deux francs cinquante Ah ! Si j'avais deux francs cinquante J'aurais bientôt trois francs cinquante Ah ! Si j'avais trois francs cinquante J'aurais bientôt quatre francs cinquante Ah ! Si j'avais quatre francs cinquante Ça m'ferait bientôt cent sous! Barcelone. Barcelone Des pavés, du soleil, des visages Un été plein d'images Et de fleurs Barcelone Dans le port un bateau qui s'amarre Le bourdon des guitares Et mon coeur J'ai revu Cette rue sous le ciel de septembre J'ai revu La fenêtre grillée de sa chambre Jours trop courts Le vent chaud caressait nos visages Et l'amour Nous jetait des étoiles au passage Barcelone Souvenir de nos nuits haletantes D'un été qui me hante Barcelone Ce matin Je reviens dans la rue douce et triste Le chemin M'a mené jusqu'au banc de jadis Et soudain Te voilà c'est bien toi rien n'existe Dès demain Tous les deux nous irons vers la vie Barcelone Sur le port, dans le vent qui se lève Je vois vivre mon rêve Barcelone Pour Jean Martin. Ce soir Ce soir la lune a mis les voiles Le vent a chassé les étoiles Et dans le noir Les rues désertes ont le cafard Ce soir La nuit se glisse sous les portes Paralysant la ville morte Jusqu'au matin J'vais faire un blues pour Jean Martin Il travaillait comme comptable Dans une quincaillerie en gros Une maison très respectable Pleine de seaux et pleine de brocs Il habitait une chambre Où y avait un lavabo Un lit dur et une table Un tapis mais pas d'rideaux Jean Martin... Jean Martin La fin du mois est tell'ment loin Un soir La lune brillait dans le ciel tendre Et les étoiles semblaient attendre Les amoureux Et Jean Martin était heureux Un soir Sur le banc près de la rivière Il allait r'trouver la caissière Du magasin C'était la fête à Jean Martin Il s'est assis tout près d'elle A respiré son parfum Il a dit vous êtes belle Si on se mariait demain Elle a ri comme une folle Elle a dit vous êtes saoul L'amour c'est des fariboles Payez-moi, j'couche avec vous Jean Martin, Jean Martin Tes rêves bleus sont tell'ment loin Alors La lune s'est mise à trembler Et les étoiles se sont plantées Comme des coins Droit dans le coeur de Jean Martin Alors Pour ne plus voir le beau visage Pour conserver son rêve sage Comme un ballot Jean Martin s'est jeté à l'eau Jean Martin... Jean Martin La fin du mois est tell'ment loin... Bourrée De Complexes. Elle s'appelle Marie-France, elle a tout juste vingt ans Et elle vient d'épouser un inspecteur des finances Un jeune homme très brillant, qui a beaucoup d'espérances Mais depuis son mariage, chacun dit en la voyant : Bourrée de complexes Elle a bien changé Faut la faire psychanalyser Chez un docteur pour la débarrasser De ses complexes à tout casser Sinon elle deviendra cinglée Elle s'ennuie tout le jour dans son bel appartement Et pour passer le temps, elle élève dans sa baignoire Des têtards et le soir quand son mari est rentré Elle préfère s'enfermer avec ses invertébrés Bourrée de complexes Elle est dérangée Il n'y a rien à espérer Il n'y a vraiment qu'à la laisser crever Tout ça pas' qu'elle a épousé Un coqu'licot déjà fané Elle s'est inscrite au Racing pour y apprendre à nager Les têtards tôt ou tard ont fini par l'inspirer Et là-bas un beau soir, elle a enfin rencontré Un sportif, un mastard, un costaud bien baraqué Bourré de complexes Et tout a changé Car il est v'nu vivre chez eux Et l' coqu'licot soudain s'est senti mieux Ayant repris toute sa vigueur Il a enlevé le maître nageur. Adieu les complexes Finis les complexes Elle a changé d' sexe Tout est arrangé Ce N'est Que L'ombre D'un Nuage... Grise sur la mer l'ombre d'un nuage Passe, lente passe effleure l'eau Et le soleil revient maintenant Nimber d'argent pur ton visage Dans tes cheveux brillants et flous sans souci l'air frais Glisse et se joue Et leur parfum d'Ambre et de chair tiède et vif frôle ma joue J'oublie soudain Toute la vie et tous les chagrins Tu lèves tes yeux verts Regarde, pâle dans l'azur La brûme légère Fond et se dissipe en un instant Une vapeur encor' qui s'attarde Serre moi plus fort entre tes mains Il n'y a rien que le ciel clair. Chantez! L'autobus vous passe sous le nez Un' grosse dame vous marche sur les pieds Votr' petite amie s'envole Avec ce salaud de Paul En laissant des cheveux plein l'évier Au bistro, le café n'est pas bon Au bureau, ça ne tourne pas rond Et votre meilleur copain Au lieu d'avoir du chagrin Il se marre et vous traite de... tsoin... tsoin... tsoin... Ah, comme la vie serait triste Triste, triste, triste Ah, comme la vie serait triste Si l'on ne pouvait pas chanter Chantez des javas canailles Que de gros durailles Dans't à Robinson Dansez des javas célestes En tombant la veste A Mimi Pinson Les journaux sont pleins de cauchemars On se tue du matin jusqu'au soir La police est sur les dents Celles des autres évidemment L'honnêt'té se vend au marché noir On annonce la hausse des rognons On dénonce la peau sur les ognons Soyons fermes mes amis Je ferai baisser les prix Mais d'abord, donnez votre pognon... Chantez sur la mer calmée Sur le Père Lachaise Et la fille Angot Magali, viens sous la ramée Tradition française Chanson à gogo On vous dit : la guerre est terminée Célébrons le règne de la Paix Embrassons nos agresseurs C'est des frères et c'est des soeurs C'est fini ! On s'battra plus jamais Le lend'main, sur le coup de midi L'oeil féroce, de gros barbus s'écrient Mourir quand on a vingt ans C'est un destin épatant Tous aux armes, et sus à l'ennemi Chantez les joyeux compères Qui déclarent la guerre Et qui n'y vont pas Chantez la prochaine dernière Et les réverbères Où on les pendra... Cinématographe. Quand j'avais six ans La première fois Que papa m'emm'na au cinéma Moi je trouvais ça Plus palpitant que n'importe quoi Y avait sur l'écran Des drôl's de gars Des moustachus Des fiers à bras Des qui s'entretuent Chaqu' fois qu'i trouvent Un cheveu dans l'plat Un piano jouait des choses d'atmosphère Guillaum' Tell ou l'grand air du Trouvère Et tout le public En frémissant S'passionnait pour ces braves gens Ça coûtait pas cher On en avait pour ses trois francs Belle, belle, belle, belle, comm' le jour Blonde, blonde, blonde, blonde, comm' l'amour Un rêve est passé sur l'écran Et dans la salle obscurément Les mains se cherchent, les mains se trouv'nt Timidement Gare, gare, gare, gare, la revoilà Et dans la salle plus d'un coeur bat La voiture où elle se croit en sûr'té Vient de s'écraser par terre Avec un essieu cassé Le bandit va pouvoir mettr' la main Sur le fric, c'est tragique Non d'un chien C'est fini, tout s'allume A mercredi prochain Maintenant ce n'est Plus mon papa Qui m'accompagne au cinéma Car il plante ses choux Là-bas pas loin de Saint Cucufa Mais j'ai rencontré Une Dalila Une drôle de môme, une fille comme ça Il ador' aller le mercredi Dans les cinémas Bien sûr c'est dev'nu l'cinémascope Mais ça r'mue toujours et ça galope Et ça reste encor' comme autrefois Rempli d'cov'boill's sans foi ni loi Et de justiciers qui vienn'nt fourrer Leur grand pied dans l'plat Gare, gare, gare, gare, Gary Cooper S'approche du ravin d'enfer Fais attention pauvre crétin Car Alan Ladd n'est pas très loin A cinq cents mètres il log' un' balle Dans un croûton d'pain Gare, gare, gare, gare, pendant c'temps-là Je sens qui m'serr' dans son grand bras Le fauteuil où je m'croyais en sûr'té N'empêche pas cett' brut' d'essayer De m'embrasser J'ai pas vu si Gary s'rait gagnant Mais comm' c'est l'cinéma permanent Mon chéri rappell' toi on est resté un an Et on a eu beaucoup d'enfants. Fais Moi Mal Johnny. Il s'est levé à mon approche Debout, il était plus petit Je me suis dit c'est dans la poche Ce mignon-là, c'est pour mon lit Il m'arrivait jusqu'à l'épaule Mais il était râblé comme tout Il m'a suivie jusqu'à ma piaule Et j'ai crié vas-y mon loup Fais-moi mal, Johnny, Johnny, Johnny Envole-moi au ciel... zoum! Fais-moi mal, Johnny, Johnny, Johnny Moi j'aim' l'amour qui fait boum! Il n'avait plus que ses chaussettes Des bell' jaunes avec des raies bleues Il m'a regardé d'un oeil bête Il comprenait rien, le malheureux Et il m'a dit l'air désolé Je n'ferais pas d'mal à une mouche Il m'énervait! Je l'ai giflé Et j'ai grincé d'un air farouche Fais-moi mal, Johnny, Johnny, Johnny Je n'suis pas une mouche... Bzzzzzzzz! Fais-moi mal, Johnny, Johnny, Johnny Moi j'aim' l'amour qui fait boum! Voyant qu'il ne s'excitait guère Je l'ai insulté sauvagement J'lui ai donné tous les noms d'la terre Et encor' d'aut's bien moins courants Ça l'a réveillé aussi sec Et il m'a dit arrête ton charre Tu m'prends vraiment pour un pauve mec J'vais t'en r'filer, d'la série noire Tu m'fais mal, Johnny, Johnny, Johnny Pas avec des pieds... Si.! Tu m'fais mal, Johnny, Johnny, Johnny J'aim' pas l'amour qui fait bing! Il a remis sa p'tite chemise Son p'tit complet, ses p'tits souliers Il est descendu l'escalier En m'laissant une épaule démise Pour des voyous de cette espèce C'est bien la peine qu'on paie des frais Maintenant, j'ai des bleus plein les fesses Et plus jamais je ne dirai Fais-moi mal, Johnny, Johnny, Johnny Envole-moi au ciel... zoum! Fais-moi mal, Johnny, Johnny, Johnny Moi j'aim' l'amour qui fait boum! Huit Jours En Italie. Chérie, te souviens-tu du Lac de Côme Où nous avons passé huit jours jolis Dans une petite auberge jaune de chrome Au bord de l'eau près des galets polis J'commençais à r'ssentir tous les symptômes Des nouveaux arrivants en Italie Et malgré mon absence de diplômes Je n'parlai qu'la langue du pays Gelati, spaghetti, frittati, legumi, salami Panino, vitello, formaggio et brodo di pollo Minestra, senapa, gazzosa, e cioccolata Les signori, ils sont servis! J'étais dev'nu calé sur la dînette Mais je ne savais pas parler d'amour Il aurait bien fallu que je répète Avec une brune aux yeux de velours Mais tu n'as pas voulu que je m'instruise Et tu as potassé ton Assimil Puis un beau soir qu'on se faisait des bises Tu m'as glissé d'un air subtil Ti voglio, ti amo, caro mio, un bacio, Corbaccio Tenero, diletto, devoto, intimo, cochono Sospiro, e spero, aspetto, m'eccita tanto Vieni vieni vieni au lit Mais tout c'que tu m'as fait dans le plumaro Dis-moi où tu l'avais appris... J'suis snob... J´suis snob... J´suis snob C´est vraiment l´seul défaut que j´gobe Ça demande des mois d´turbin C´est une vie de galérien Mais lorsque je sors avec Hildegard C'est toujours moi qu'on r'gard' J´suis snob... Foutrement snob Tous mes amis le sont On est snobs et c´est bon Chemises d´organdi, chaussures de zébu Cravate d´Italie et méchant complet vermoulu Un rubis au doigt... de pied, pas çui-là Les ongles tout noirs et un tres joli p´tit mouchoir J´vais au cinéma voir des films suédois Et j´entre au bistro pour boire du whisky à gogo J´ai pas mal au foie, personne fait plus ça J´ai un ulcère, c´est moins banal et plus cher J´suis snob... J´suis snob J´m´appelle Patrick, mais on dit Bob Je fais du ch´val tous les matins Car j´ador´ l´odeur du crottin Je ne fréquente que des baronnes Aux noms comme des trombones J´suis snob... Excessivement snob Et quand j´parle d´amour C´est tout nu dans la cour On se réunit avec les amis Tous les vendredis, pour faire des snobisme-parties Il y a du coca, on deteste ça Et du camembert qu´on mange à la petite cuiller Mon appartement est vraiment charmant J´me chauffe au diamant, on n´peut rien rêver d´plus fumant J´avais la télé, mais ça m´ennuyait Je l´ai r´tournée... d´l´aut´ côté c´est passionnant J´suis snob... J´suis snob J´suis ravagé par ce microbe J´ai des accidents en Jaguar Je passe le mois d´août au plumard C´est dans les p´tits détails comme ça Que l´on est snob ou pas J´suis snob... Encor plus snob que tout à l´heure Et quand je serai mort J´veux un suaire de chez Dior! Je bois... Je bois systématiquement Pour oublier les amis de ma femme Je bois systématiquement Pour oublier tous mes emmerdements Je bois n'importe quel jaja Pourvu qu'il fasse ses douze degrés cinq Je bois la pire des vinasses C'est dégueulasse mais ça fait passer l'temps La vie est-elle tellement marrante La vie est-elle tellement vivante Je pose ces deux questions La vie vaut-elle d'être vécue L'amour vaut-il qu'on soit cocu Je pose ces deux questions Auxquelles personne ne répond Et je bois systématiquement Pour oublier le prochain jour du terme Je bois systématiquement Pour oublier que je n'ai plus vingt ans Je bois sans y prendre plaisir Pour être saoul Pour ne plus voir ma gueule Je bois dès que j'ai des loisirs Pour pas me dire qu'il faudrait en finir. L'Ame Slave. L'air slave J'ai l'air slave Je suis né à Ville d'Avray Mes parents étaient bien français Ma mère s'app'lait Jeanne et mon père Victor Mais j'm'appelle Igor Mon prénom n'évoque Pas le Languedoc Plutôt moscovite Il est explicite Quand on m'imagine On voit un barine Qui s'apprête à boire A son samovar L'air slave J'ai l'air slave Et ça me poursuit depuis tellement longtemps Que je suis devenu slave malgré moi et sans M'en apercevoir L'âme slave J'ai l'âme slave Je n'ai jamais été plus loin que la barrière de Pantin Tout c'que j'ai d'russe en moi c'est le prénom Mais ça suffit bien A force d'entendre Tous les gens me prendre Pour un russe authentique J'en ai tous les tiques Je vis de zakouski Je bouffe des piroschki Je bois de la vodka Au milieu des r'pas L'âme slave J'ai l'âme slave Je suis tellement influencé par mon prénom Qu'à toutes les f'nêtres de la maison je viens d'faire mettre Des rideaux de fer Mais j'les laisse ouverts... L'âme slave... L'Année A L'Envers. Avril succède à mai Et mars vient juste après Ah, quelle drôle de saison Que nous vivons, que nous vivons Et puis c'est février Suivi du mois de janvier Décembre va venir On ne sais plus quoi dire L'année passée l'année passée C'était beaucoup plus calme Mais cette drôle d'année renversée Ne manque pas de charme Décembre est dépassé Novembre a commencé Si ça pouvait seulement Durer longtemps, durer longtemps Si ça pouvait durer Jusqu'au mois de juillet Jusqu'à ce foutu soir Où tu m'as laissé choir Le soir très doux d'un jour heureux Où j'avais pris tes lèvres Quand je repense à tes yeux bleus J'en ai la fièvre Voilà qu'octobre arrive Et passe à la dérive Septembre accourt derrière C'est un mystère, c'est un mystère Le mois d'août à l'horizon Fredonne ces chansons Vacances de l'an dernier Que je vous ai pleurées! Voilà juillet qui montre enfin Sa tête blonde et sage Si l'on retourne jusqu'en juin Je crois aux mirages Avril est revenu Je marche dans la rue J'ai rajeuni d'un an C'est épatant, c'est épatant Je frappe à la fenêtre Tu daignes apparaître Mais quoi, chose bizarre Tu as de grands yeux noirs Je me trompais, c'est une erreur C'est bien l'année nouvelle Voici ma vie... voici mon coeur Venez, ma belle.. La Complainte De Mackie. Les dents longues, redoutables Le requin tue sans merci Le surin au fond d'la poche Sans reproche, c'est Mackie Sur les bords de la Tamise Le sang coule dans la nuit On périt les poches vides Poches pleines, quelqu'un fuit Gens de bien ou hommes riches Disparaissent au grand jour Sur leurs traces, quelqu'un passe Qui ramène le butin Jenny Trowler agonise Un couteau entre les seins Sur les rives dans l'eau grise M'sieur Mackie s'en lave les mains Et la veuve d'âge tendre Que l'on viole dans son lit Que l'on vole sans attendre Le gentleman, c'est Mackie Le feu gronde dans la ville Le feu brille, la mort vient On s'étonne, on questionne Oui mais Mackie ne sait rien Le sang coule des mâchoires Au repas du grand requin Mains gantées et nappe blanche M'sieur Mackie croque son prochain... La Complainte Du Progrès. Autrefois pour faire sa cour On parlaient d'amour Pour mieux prouver son ardeur on offraient son coeur Maintenant c'est plus pareil Ça change ça change pour séduire le cher ange on lui glisse à l'oreille Ah! Gudule Viens m'embrasser Et je te donnerai Un frigidaire Un joli scoutaire Un atomixère Et du Dunlopillo Une cuisinière Avec un four en verre Des tas de couverts Et des pelles à gâteaux Une tourniquette Pour faire la vinaigrette Un bel aérateur Pour bouffer les odeurs Des draps qui chauffent Un pistolet à gauffres Un avion pour deux (pause) Et nous serons heureux Autrefois s'il arrivait Que l'on se querelle L’air lugubre on s'en allait En laissant la vaisselle Maintenant que voulez-vous La vie est si chère On dit rentre chez ta mère Et on se garde tout Ah! Gudule Excuse-toi Ou je reprends tout ça Mon frigidaire Mon armoire à cuillères Mon évier en fer Et mon poêle à mazout Mon cire-godasses Mon repasse-limaces Mon tabouret à glace Et mon chasse-filous La tourniquette A faire la vinaigrette Le ratatine-ordures Et le coupe-friture Et si la belle Se montre encore rebelle On la fiche dehors pour confier son sort Au frigidaire À l'efface-poussière À la cuisinière Au lit qu'est toujours fait Au chauffe-savates Au canon à patates À l'éventre-tomates À l'écorche-poulet Mais très très vite on reçoit la visite D'une tendre petite Qui nous offre son coeur Alors on cède Car il faut qu’on s’entraide Et l’on vit comme ça Jusqu’à la prochaine fois Et l'on vit comme ça Jusqu'à la prochaine fois Et l'on vit comme ça Jusqu'à la prochaine fois La Java Des Bombes Atomiques. Mon oncle un fameux bricoleur Faisait en amateur Des bombes atomiques Sans avoir jamais rien appris C'était un vrai génie Question travaux pratiques Il s'enfermait tout' la journée Au fond d'son atelier Pour fair' des expériences Et le soir il rentrait chez nous Et nous mettait en trans' En nous racontant tout Pour fabriquer une bombe " A " Mes enfants croyez-moi C'est vraiment de la tarte La question du détonateur S'résout en un quart d'heur' C'est de cell's qu'on écarte En c'qui concerne la bombe " H " C'est pas beaucoup plus vach' Mais un' chos' me tourmente C'est qu'cell's de ma fabrication N'ont qu'un rayon d'action De trois mètres cinquante Y a quéqu'chos' qui cloch' là-d'dans J'y retourne immédiat'ment Il a bossé pendant des jours Tâchant avec amour D'améliorer l'modèle Quand il déjeunait avec nous Il avalait d'un coup Sa soupe au vermicelle On voyait à son air féroce Qu'il tombait sur un os Mais on n'osait rien dire Et pis un soir pendant l'repas V'là tonton qui soupir' Et qui s'écrie comm' ça A mesur' que je deviens vieux Je m'en aperçois mieux J'ai le cerveau qui flanche Soyons sérieux disons le mot C'est même plus un cerveau C'est comm' de la sauce blanche Voilà des mois et des années Que j'essaye d'augmenter La portée de ma bombe Et je n'me suis pas rendu compt' Que la seul' chos' qui compt' C'est l'endroit où s'qu'ell' tombe Y a quéqu'chose qui cloch' là-d'dans, J'y retourne immédiat'ment Sachant proche le résultat Tous les grands chefs d'Etat Lui ont rendu visite Il les reçut et s'excusa De ce que sa cagna Etait aussi petite Mais sitôt qu'ils sont tous entrés Il les a enfermés En disant soyez sages Et, quand la bombe a explosé De tous ces personnages Il n'en est rien resté Tonton devant ce résultat Ne se dégonfla pas Et joua les andouilles Au Tribunal on l'a traîné Et devant les jurés Le voilà qui bafouille Messieurs c'est un hasard affreux Mais je jur' devant Dieu En mon âme et conscience Qu'en détruisant tous ces tordus Je suis bien convaincu D'avoir servi la France On était dans l'embarras Alors on l'condamna Et puis on l'amnistia Et l'pays reconnaissant L'élu immédiat'ment Chef du gouvernement La Java Des Chaussettes A Clous. Très mutines, toujours accortes Elles donnent à qui les portent Une grâce virile et forte Et toujours de très bon aloi Dépouillées de toute équivoque D'un noir d'encre, sans rien qui choque Cuir de vache ou bien façon phoque Elles prennent force de loi. Ce sont les chaussettes à clous Compagnes chéries des chastes gendarmes Oyez le plaisant vacarme C'est là tout le charme Des chaussettes à clous. -Gendarme Combaluzier Avez-vous ciré vos godasses ? -Oui brigadier -Alors veillez à ne pas les gâter dans quelque colombin Depuis l'aube au crépuscule Ignorantes du ridicule Elles portent à qui circule Les conseils du simple bon sens Pour régler les tristes querelles Des voyous et de leurs donzelles Elles dansent la tarentelle Sur les pieds de tous les feignants Ce sont les chaussettes à clous Compagnes chéries des brillants gendarmes Remède à toutes les larmes C'est là tout le charme Des chaussettes à clous. -Gendarme Edoux-Samain Combien de contredanses avez-vous exécutées ce matin ? -Cent treize, brigadier -Gendarme, ce n'est guère! Attention, on vous surveille Ustensiles fort sociables Elles prennent un contact aimable Avce l'?il ou avec le râble Du badaud qui ne sert à rien Réformant la jeunesse oisive Elles font propagande active Dans le ventre ou dans les gencives Des crétins du Quartier latin. Ce sont les chaussettes à clous Compagnes chéries des humbles gendarmes Parure en même temps qu'arme C'est là tout le charme Des chaussettes à clous. -Gendarme Otis Pifre, vous avez de la cervelle sur votre chaussure gauche -Excusez, brigadier... -La prochaine fois, essuyez-vous aux cheveux du prévenu Très discrètes, c'est sans histoires Pendant les interrogatoires Qu'elles aident ceux du prétoire De leur poids et de leur sagesse Respectant toujours la cadence Elles brisent joyeuse danse Les tibias et la résistance Des malfrats vaincus qu'on confesse. Ce sont les chaussettes à clous Des juges si doux, zélés auxiliaires Calmez toutes vos alarmes Vivons sous le charme Des chaussettes à clous. Calmez toutes vos alarmes Vivons sous le charme Des chaussettes à clous. La Java Martienne. En descendant de la fusée Je t'ai trouvée presque aussitôt Et je suis resté médusé Tu m'avais pris comme au lasso Je t'ai suivie sur la pelouse Tes tentacules autour du cou Et avec tes petites ventouses Tu m'as fait des baisers partout Les musiciens soufflaient sans trêve Dans leurs bazouks et leurs strapons Et cette musique de rêve Me perforait jusqu'au trognon J'évoquais des orgies superbes Des bacchanales dans les canaux Et pendant qu'on s'aimait sur l'herbe Je fredonnais ces quelques mots C'est la java martienne La java des amoureux En fermant mes persiennes Je revois tes trois grands yeux Ça marse toujours, ça marse comme ça Oui saturne à tour de bras La java d'amour, martiale java Que j'ai dansée dans tes bras C'est la java martienne La java des amoureux Toutes tes mains dans les miennes Je revois tes trois grands yeux On s'est aimés comm' dans un rêve Mais hélas j'ai dû repartir Et nos amours ont été brèves Chérie je voudrais revenir Ton nom me hantera sans cesse Pendant les longues nuits d'été Ton nom doux comme une caresse Porfichtoumikdabicroûté Un jour je monterai peut-être Chercher le fruit de nos amours Cet enfant bâti comme un hêtre Qui naquit au bout de huit jours En voyant amarsir son père Le chéri l'aimera beaucoup Et prendra pour courir lui dire Ses treize jambes à ses deux cous C'est la java martienne La java des amoureux En fermant mes persiennes Je revois tes trois grands yeux Ça marse toujours, ça marse comme ça Oui saturne à tour de bras La java d'amour, martiale java Que j'ai dansée dans tes bras C'est la java martienne La java des amoureux Toutes tes mains dans les miennes Je revois tes trois grands yeux Pour retrouver mon rêve Ma martienne aux trois yeux bleus Allons-y, mars ou crève Je remonterai-z-aux cieux La Malédiction Des Balais. Avant de tomber en poussière On fait un p'tit stage sur la Terre On perd quelques heures à la guerre On tombe amoureux d'une mégère Naguère, naguère On pouvait s' reposer Naguère, naguère On pouvait s'amuser Naguère, naguère Il suffisait d' manger Naguère, naguère Mais tout a bien changé Depuis les arts ménagers On sait qu'il faut ranger Et passer le balai Pour l'hygiène de vos palais Maudissons les balais-brosses, les balais-joncs Les balais droits, les balais ronds Les balais d' bouleau Maudissons les p'tits balais des mirlitons La tête de loup, les balais d' crin Et les balais de musicien Dès l'aube, nos enfants, nos compagnes Se lèvent et se mettent en campagne Cirage, paille de fer, blanc d'Espagne J' croyais qu'on n' croyait plus au bagne Naguère, naguère Pour qu'on vous force à ça Naguère, naguère Fallait en tuer des tas Naguère, naguère On travaillait gaiement Naguère, naguère Tout l' monde était content Mais avec ces robots Qui pèsent des tas d' kilos Faut brosser nuit et jour Dans un bruit qui vous rend sourd Maudissons les balais fins, les balais gros Ceux qu'ont pas d'poils, ceux qu'en ont plein Et ceux des goguenots Maudissons les balais noirs, les balais blancs Ceux en sorgho, ceux en chiendent Et ceux qu'on casse sur l' dos des gens Mais c'est samedi, ne nous attristons pas Laissons tomber tous les tracas Chevauchons l' balai du sabbat Demain, nous ne balaierons pas Chevauchons l' balai du sabbat Demain, nous ne balaierons pas Balaierons pas Balaierons pas Balaierons pas Balaierons pas... La Marche Des Gosses. Marche au pas, marche droit Un tambour à tête de bois Vas-y nick nack paddy whack et vas-y mon gars Un tambour à tête de bois. En chemin rencontra Un second tambour du roi Salut nick nack paddy whack et vas-y mon gars Deux tambours ça marche au pas Pas bien loin dans le bois Un troisième les rattrapa Ohé nick nack paddy whack et vas-y mon gars Trois tambours qui marchent droit Ils ont fait quatre pas Quand un quatrième les voit vas-y nick nack paddy whack et vas-y mon gars Quatre tambours c'est mieux que trois Cinq tambours ont bien le droit De boire un coup chez le père François Vas-y nick nack paddy whack et vas-y mon gars Cinq tambours qu'est-ce que ça boit ! Six tambours sans fla-fla Quittent leur habit de soldat Vas-y nick nack paddy whack et vas-y mon gars Six tambours et on remet ça. Sept tambours à la fois Tambourinent à tour de bras Vas-y nick nack paddy whack et vas-y mon gars Sept tambours c'est la nouba Huit tambours, oh la la Ont bu tout le vin d'Arbois Vas-y nick nack paddy whack et vas-y mon gars Huit tambours vont de guingois Neuf tambours... mais je crois Que neuf tambours ça suffira Vas-y nick nack paddy whack et salut les gars A bientôt on se reverra. La Valse Jaune. Il y a du soleil dans la rue Moi j'aime le soleil mais j'ai peur des gens Et je reste caché tout l'temps A l'abri des volets d'acier noir Il y a du soleil dans la rue Moi j'aime bien la rue mais quand elle s'endort Et j'attends que le jour soit mort Et je vais rêver sur les trottoirs Et l'soleil De l'aut' côté du monde Danse une valse blonde Avec la terre ronde, ronde, ronde, ronde Le soleil Rayonnant comme un faune Danse une valse jaune Pour ceux de l'autre ciel Mais moi j'ai la nuit dans ma poche Et la lune qui accroche De l'ombre au coin des toits Je vois tous les songes qui volent En lentes banderoles Et se perdent là-bas Et l'soleil Fait le tout de la terre Et revient sans s'en faire Et la rue se remplit de travail et de bruit Alors C'est là que j'me méfie... Car il y a du travail dans la vie Moi j'aime pas l'travail mais j'aime bien la vie Et j'vais voir de quoi elle a l'air En f'sant gaffe de pas trop en faire Y en a qui comprennent pas la vie Six heures du matin, ils sont déjà l'vés Ça fait vraiment un drôle d'effet Ça dégoûte presque autant qu'la pluie Et l'soleil De l'aut' côté du monde Danse une valse blonde Avec la terre ronde, ronde, ronde, ronde Le soleil Rayonnant comme un faune Danse une valse jaune Pour ceux de l'autre ciel Mais moi j'ai la nuit dans ma poche Et la lune qui accroche De l'ombre au coin des toits Je vois tous les songes qui volent En lentes banderoles Et se perdent là-bas Et l'soleil Fait le tout de la terre Et revient sans s'en faire Et la rue se remplit de travail et de bruit Alors Moi je me mets au lit... Le Petit Commerce. J'ai vendu du mouron Mais ça n'a pas marché J'ai vendu des cravates Les gens étaient fauchés J'ai vendu des ciseaux Et des lames de rasoir Des peignes en corozo Des limes et des hachoirs J'ai essayé les fraises J'ai tâté du muguet J'ai rempaillé des chaises Réparé des bidets Je tirais ma charrette Sur le mauvais pavé J'allais perdre la tête Mais j'ai enfin trouvé Je roule en Cadillac dans les rues de Paris Depuis que j'ai compris la vie J'ai un petit hôtel, trois domestiques et un chauffeur Et les flics me saluent comme un des leurs Je vends des canons Des courts et des longs Des grands et des petits J'en ai à tous les prix Y a toujours amateur pour ces délicats instruments Je suis marchand d'canons venez me voir pour vos enfants Canons à vendre ! Avec votre ferraille On forge ces engins Qui foutront la pagaille Parmi ceux du voisin Ça donne de l'ouvrage A tous les ouvriers Et chacun envisage De fonder un foyer Pour se faire des finances On fabrique des lardons On touche l'assurance Et les allocations Ça n'a pas d'importance Car lorsqu'ils seront grands Ils iront, en cadence Crever pour quelques francs Je vendais des canons dans les rues de la terre Mais mon commerce a trop marché J'ai fait faire des affaires à tous les fabricants d'cimetières Mais moi maint'nant je me retrouve à pied Tous mes bons clients Sont morts en chantant Et seul dans la vie Je vais sans souci Au coin des vieilles rues, le coeur content, le pied léger Je danse la carmagnole, y a plus personne sur le pavé Canons en solde ! Les Jardins De Banlieue. En banlieue Des trains, des remblais et des gares Et puis on y est sans crier gare En banlieue On quitte Paris dans la suie Et voilà les maisons fleuries De banlieue L'été, y a des lilas qui chantent Sur des rythmes de valse lente La banlieue Les ptits jardins bien astiqués Les ptits rentiers tout étriqués Les ptit's filles en robe de piqué Et les ptites rues mal indiquées De banlieue, de ma banlieue Tout près d'Paris Dans la verdure Oh ma chérie Pourvu quêta dure Ma banlieue... J'me rappelle, on était tout mômes Tu vois, on vivait par là Sens?tu le rosier qui embaume Les narcisses et les dahlias C'est là, on poussait la barrière On se croyait si loin de tout La maison était pleine de lierre Et y avait des oiseaux partout Les Joyeux Bouchers. C'est le tango des bouchers de la Villette C'est le tango des tueurs des abattoirs Venez cueillir la fraise et l'amourette Et boire du sang avant qu'il soit tout noir Faut qu' ça saigne Faut qu' les gens ayent à bouffer Faut qu' les gros puissent se goinfrer Faut qu' les petits puissent engraisser Faut qu' ça saigne Faut qu' les mandataires aux Halles Puissent s'en fourer plein la dalle Du filet à huit cent balles Faut qu' ça saigne Faut qu' les peaux se fassent tanner Faut qu' les pieds se fassent paner Que les têtes aillent mariner Faut qu' ça saigne Faut avaler d' la barbaque Pour êt'e bien gras quand on claque Et nourrir des vers comaques Faut qu' ça saigne Bien fort C'est le tango des joyeux militaires Des gais vainqueurs de partout et d'ailleurs C'est le tango des fameux va-t-en guerre C'est le tango de tous les fossoyeurs Faut qu' ça saigne Appuie sur la baïonnette Faut qu' ça rentre ou bien qu' ça pète Sinon t'auras une grosse tête Faut qu' ça saigne Démolis en quelques-uns Tant pis si c'est des cousins Fais-leur sortir le raisin Faut qu' ça saigne Si c'est pas toi qui les crèves Les copains prendront la r'lève Et tu joueras la Vie brève Faut qu' ça saigne Demain ça sera ton tour Demain ça sera ton jour Pus d' bonhomme et pus d'amour Tiens ! Voilà du boudin ! Voilà du boudin ! Voilà du boudin ! Mozart Avec Nous. Au temps des dorur' et des falbalas Les marquis frivol' et les marquis' au frais minois Pour un menuet timide Esquissaient trois petits pas Grâces envolées, vieux airs du passé Clavecin fragile aux résonances d'autrefois Un gosse à perruque blanche A fait danser tous ces gens-là Cha cha cha, cha cha cha, non tu n'existais pas encore Cha cha cha, cha cha cha, le Brésil n'en était pas là Douce mélodie qui fit cent fois le tour du monde Et que Mozart a négligé d'agrémenter de quelques cha cha cha Sur ton rythme gai dansez les brunes et les blond' En oubliant le temps bien proche où pianotaient vos petits doigts Cha cha cha, cha cha cha, c'est votre vieille Marche Turque Cha cha cha, cha cha cha, venez marquise, écouter ça! Tout près d'Istambul, sous les pergolas Tous les jeunes Turcs s'en vont danser le cha cha cha Et la fraîche odeur des roses Vient parfumer leurs ébats Sous le ciel troublant des nuits de gala Quand un beau danseur serre un fille entre ses bras Dans les yeux de sa compagne Il sait ce qu'il trouvera Cha cha cha, cha cha cha, ce gai refrain qui nous enivre Cha cha cha, cha cha cha, et qui jamais ne finira Que ce soit Rio, Paris, New York, les Dardanelles On ne peut résister longtemps quand on entend venir le cha cha cha Rythme tropical aux senteurs d'ambre et de cannelle Emporte-nous bien loin de tout dans l'allégresse et dans la joie Cha cha cha, cha cha cha, nuits étoilées sur le Bosphore Cha cha cha, cha cha cha, drôl' de truc turc que ce truc-là Cha cha cha, cha cha cha, ah non vraiment, on n'est pas forts Cha cha cha, cha cha cha, Mozart ne méritait pas ça Mais faut bien vi-i-ivre Ne vous mariez pas les filles... Avez-vous vu un homme à poil Sortir soudain d'la salle de bains Dégoulinant par tous les poils Et la moustache pleine de chagrin ? Avez-vous vu un homme bien laid En train d'manger des spaghetti Fourchette au poing, l'air abruti D'la sauce tomate sur son gilet Quand ils sont beaux, ils sont idiots Quand ils sont vieux, ils sont affreux Quand ils sont grands, ils sont feignants Quand ils sont p'tits, ils sont méchants Avez-vous vu un homme trop gros Extraire ses jambes de son dodo S'masser l'ventre et s'gratter les tifs En r'gardant ses pieds l'air pensif ? Ne vous mariez pas, les filles, ne vous mariez pas Faites plutôt du cinéma Restez pucell' chez vot' papa Dev'nez serveuse chez un bougnat El'vez des singes, él'vez des chats Levez la patte à l'Opéra Vendez des boît' de chocolat Prenez le voile ou l'prenez pas Dansez à poil pour les gagas Soyez radeuse av'nue du Bois Mais ne vous mariez pas, les filles Ne vous mariez pas Avez-vous vu un homme gêné Rentrer top tard pour le dîner Du rouge à lèvres sur son col Du flageolant dans la guibole Avez-vous vu au cabaret Un monsieur qui n'est plus très frais Se frotter avec insistance Sur un' petite fleur d'innocence Quand ils sont bêtes, ils vous embêtent Quand ils sont forts, ils font du sport Quand ils sont riches, ils gard'nt l'artiche Quand ils sont durs, ils vous torturent Avez-vous vu à votre bras Un maigrichon aux yeux de rat Friser ses trois poils de moustache Et se redresser, l'air bravache Ne vous mariez pas, les filles, ne vous mariez pas Mettez vos robes de gala Allez danser à l'Olympia Changez d'amant quat' fois par mois Prenez la braise et gardez-la Cachez la fraîche sous vos matelas À cinquante ans ça servira À vous payer des beaux p'tits gars Rien dans la tête, tout dans les bras Ah, la belle vie que ça sera Si vous n'vous mariez pas, les filles Si vous n'vous mariez pas On N'est Pas Là Pour Se Faire Engueuler. Un beau matin de juillet, le réveil À sonné dès le lever du soleil Et j'ai dit à ma poupée faut te s'couer C'est aujourd'hui qu'il passe On arrive sur le boulevard sans retard Pour voir défiler le roi d' Zanzibar Mais sur-le-champ on est refoulé par les agents Alors j'ai dit On n'est pas là pour se faire engueuler On est là pour voir le défilé On n'est pas là pour se faire assommer On est venu pour voir le défilé Si tout le monde était resté chez soi Ça ferait du tort à la République Laissez-nous donc qu'on le regarde Sinon, plus tard, quand la reine reviendra Ma parole, nous on reviendra pas Jour de la fête à Julot, mon poteau Je l'ai invité dans un p'tit bistro Où l'on trouve un beaujolais vrai de vrai Un nectar de première On est sorti très à l'aise et voilà Que j'ai eu l'idée de l'ram'ner chez moi Mais j'ai compris devant l'rouleau à pâtisserie Alors j'ai dit On n'est pas là pour se faire engueuler On est là pour la fête à mon pote On n'est pas là pour se faire assommer On est venu faire une petite belotte Si tout le monde restait toujours tout seul Ça serait d'une tristesse pas croyable Ouvre cette porte et sors des verres Ne t'obstine pas ou sans ça l'prochain coup Ma parole, j'rentre plus du tout Ma femme a cogné si fort cette fois-là Qu'on a trépassé l'soir même et voilà Qu'on se r'trouve au paradis vers minuit Devant monsieur Saint-Pierre Il y avait quelques élus qui rentraient Mais sitôt que l'on s'approche du guichet On est r'foulé et Saint-Pierre se met à râler Alors j'ai dit On n'est pas là pour se faire engueuler On est venu essayer l'auréole On n'est pas là pour se faire assommer On est mort, il est temps qu'on rigole Si vous flanquez les ivrognes à la porte Il doit pas vous rester beaucoup d'monde Portez-vous bien, mais nous on s'barre Et puis on est descendu chez Satan Et en bas c'était épatant C' qui prouve qu'en protestant Quand il est encore temps On peut finir par obtenir des ménagements Un beau matin de juillet, le réveil À sonné dès le lever du soleil Et j'ai dit à ma poupée faut te s'couer C'est aujourd'hui qu'il passe On arrive sur le boulevard sans retard Pour voir défiler le roi d' Zanzibar Mais sur-le-champ on est refoulé par les agents Alors j'ai dit On n'est pas là pour se faire engueuler On est là pour voir le défilé On n'est pas là pour se faire assommer On est venu pour voir le défilé Si tout le monde était resté chez soi Ça ferait du tort à la République Laissez-nous donc qu'on le regarde Sinon, plus tard, quand la reine reviendra Ma parole, nous on reviendra pas Jour de la fête à Julot, mon poteau Je l'ai invité dans un p'tit bistro Où l'on trouve un beaujolais vrai de vrai Un nectar de première On est sorti très à l'aise et voilà Que j'ai eu l'idée de l'ram'ner chez moi Mais j'ai compris devant l'rouleau à pâtisserie Alors j'ai dit On n'est pas là pour se faire engueuler On est là pour la fête à mon pote On n'est pas là pour se faire assommer On est venu faire une petite belotte Si tout le monde restait toujours tout seul Ça serait d'une tristesse pas croyable Ouvre cette porte et sors des verres Ne t'obstine pas ou sans ça l'prochain coup Ma parole, j'rentre plus du tout Ma femme a cogné si fort cette fois-là Qu'on a trépassé l'soir même et voilà Qu'on se r'trouve au paradis vers minuit Devant monsieur Saint-Pierre Il y avait quelques élus qui rentraient Mais sitôt que l'on s'approche du guichet On est r'foulé et Saint-Pierre se met à râler Alors j'ai dit On n'est pas là pour se faire engueuler On est venu essayer l'auréole On n'est pas là pour se faire assommer On est mort, il est temps qu'on rigole Si vous flanquez les ivrognes à la porte Il doit pas vous rester beaucoup d'monde Portez-vous bien, mais nous on s'barre Et puis on est descendu chez Satan Et en bas c'était épatant C' qui prouve qu'en protestant Quand il est encore temps On peut finir par obtenir des ménagements Quand j'aurai du vent dans mon crâne... Quand j'aurai du vent dans mon crâne Quand j'aurai du vert sur mes os P'tête qu'on croira que je ricane Mais ça s'ra une impression fosse Car il me manquera Mon élément plastique Plastique tiqu' tiqu' Qu'auront bouffé les rats Ma paire de bidules Mes mollets mes rotules Mes cuisses et mon cule Sur quoi je m'asseyois Mes cheveux mes fistules Mes jolis yeux cérules Mes couvre mandibules Dont je vous pourlèchois Mon nez considérable Mon coeur mon foie mon râble Tous ces riens admirables Qui m'ont fait apprécier Des ducs et des duchesses Des papes des papesses Des abbés des ânesses Et des gens du métier Et puis je n'aurai plus Ce phosphore un peu mou Cerveau qui me servit A me prévoir sans vie Les osses tout verts Le crâne venteux Ah comme j'ai mal Rue Traversière. Dans la rue Traversière Il y poussait des roses Et tout un tas d'aut' choses Que personne ne voyait. Dans la rue Traversière Y avait un vieux bébé Qui pleurait à la f'ntre Pac' qu'il allait tomber. Dans la rue Traversière Y avait un' grand'maman Qui montrait son derrière Pour deux cent trente-cinq francs. Dans la rue Traversière Silencieux près d'une borne Y avait un militaire Les pieds dans son bicorne Dans la rue Traversière Y avait un inventeur Qui f'sait des montgolfières En noir et en couleurs. Dans la rue Traversière Y avait une guillotine Qui coupait des cigares Pour le papa d'Aline Dans la rue Traversière Y avait des amoureux Sous les portes cochères Qui se comptaient les yeux Dans la rue Traversière Y avait des lions féroces Habillés en cosaques Pour aller à la noce. Dans la rue Traversière On n'y passait jamais C'était pas une vraie rue Et tout l'monde était mort... La Valse Des Mannequins. Refrain 1. Mannequin Taille mince et cheveux de lin Corps de reine et regard lointain Qui trouble les plus sages Mannequin Perle fine aux dix mille écrins De velours, de soie, de satin Fleur changeante et sauvage Tout' l'année Plus parée qu'une fée, tu sais Provoquer les désirs cachés Des spectateurs charmés Mannequin Doux visage et cruel destin Impassible, tu vas, tu viens Tourne, beau mannequin... Couplet. Tu as beau être femme Ta vie te condamne A n'être jamais qu'un objet Tu as beau être belle Toutes tes dentelles C'est pour d'autres que tu les mets Tu as beau être douce Ton métier te pousse A rester lointaine et distante Tu as beau être fière Il faut bien t'y faire Tu sers d'appât pour les clientes Refrain 2. Mannequin Jolie fleur d'un Paris sans coeur Tu as su trouver le bonheur Dans ton quartier tranquille Mannequin Chaque soir tu mets avec joie Pantalon, chandail, souliers plats Adieu les imbéciles Dans ses bras Tu oublies cette comédie Que tu joues chaqu'jour de ta vie Et tu redeviens toi Mannequin Tu t'animes et tu vis enfin Et tu te ris du lendemain Rêve, beau mannequin... Y'en A Qui Ont Des Trompinettes... Y en a qui ont des trompinettes Et des bugles Et des serpents Y en a qui ont des clarinettes Et des ophicléides géants Y en a qui ont des gros tambours Bourre bourre bourre Et Ran plan plan Mais moi j'ai qu'un mirliton Et je mirlitonne Du soir au matin Moi je n'ai qu'un mirliton Mais ça m'est égal si j'en joue bien. Oui mais voilà, est-ce que j'en joue bien ? Note. (1) Variante: "Que j'emporte des armes Et que je sais tirer" Source: http://www.poesies.net