Les Saisons. Par Georges De Scudéry (1601-1667) TABLE DES MATIERES. Le Printemps. L’Automne. L’Hiver. L’Été. Le Printemps. Enfin la belle Aurore, a tant versé de pleurs, Que l'aimable Printemps nous fait revoir ses charmes; Il peint en sa faveur, les herbes et les fleurs, Et tout ce riche Émail, est l'effet de ses larmes. Cibèle que l'Hiver accablait de douleurs, Et qui souffrait des vents les insolents vacarmes; Mêle parmi ses Tours, les plus vives couleurs, Et triomphe à la fin par ces brillantes Armes. Les Roses et les Lis, d'un merveilleux éclat, Confondent la blancheur, au beau lustre incarnat; La Tulipe changeante, étale sa peinture: Le Narcisse agréable, à l'Anémone est joint; Bref, tout se rajeunit; tout change en la Nature; Mais superbe Philis, mon sort ne change point. L’Automne. Ô Saison bienfaisante, aimable et douce Automne, Toi que le Soleil voit d'un regard tempéré; Toi qui par les présents, que ta faveur nous donne, Fais arriver un bien, qu'on a tant espéré. Ce riche amas de fruits, dont ton front se couronne, Rend par tous nos Hameaux, ton Autel révéré; L'Abondance te suit; le Plaisir t'environne; Mais un plaisir tranquille, aussi bien qu'assuré. Bacchus te suit partout; et Cérès t'accompagne; Les Côteaux élevés, et la vaste Campagne, Leurs raisins et leurs blés, te montrent tour à tour: Chacun dans l'Univers, a le fruit de ses peines; Moi seul, hélas moi seul, abusé par l'Amour, N'ai qu'un espoir trompeur, et des promesses vaines. L’Hiver. L'Air paraît tout obscur; la clarté diminue; Les arbres sont tous nus; les ruisseaux tous glacés; Et les rochers affreux, sur leurs fronts hérissés, Reçoivent cet amas, qui tombe de la Nue. Tout le Ciel fond en eau; la grêle continue; Des vents impétueux, les toits sont renversés; Et Neptune en fureur, aux Vaisseaux dispersés, Fait sentir du Trident, la force trop connue: Un froid âpre et cuisant, a saisi tous les corps; Le Soleil contre lui, fait de faibles efforts; Et cet Astre blafard, n'a chaleur, ni lumière: L'Univers désolé, n'a plus herbes ni fleurs; Mais on le doit revoir, dans sa beauté première, Et l'orage éternel, ne se voit qu'en mes pleurs. L’Été. Environné de feux, et couvert de lumière, Tu sors de l'Océan, Astre de l'Univers; Et des premiers rayons, de ta clarté première, Tu m'échauffes l'esprit, et m'inspires ces Vers. Tu brilles de splendeur; tu brûles toutes choses; Les Vallons les plus frais, en vain t'ont résisté Tu fais languir les Lis; tu fais mourir les Roses; Et la Neige est fondue, aux chaleurs de l'Été. L'air est étincelant; la terre est desséchée; La Palme la plus fière, a la tête penchée; Le Laurier le plus vert, résiste vainement Tout fume; tout périt; par la celeste flamme; Mais la plus vive ardeur d'un tel embrasement, M'incommode bien moins que celle de mon âme. Source: http://www.poesies.net