I
Le chat était de nuit. La nuit était de sable.
Des fontaines d'argent passaient dans le ciel bleu.
Les étoiles brillaient sur l'arche formidable
Des constellations et des torrents de feu.
II
Le ciel était si bleu, les nuits étaient si belles,
Et les jours rayonnaient interminablement.
Sur les mirages d'or de nos présences frêles
L'azur réfléchissait l'encre du firmament.
III
Sous cet abîme blême ou scintillait la lune,
O combien avions nous construit de souvenirs?
L'univers était là, pâle dans l'ombre brune
Qui versait dans nos yeux ces rêves d'avenirs,
IV
Les soirs qui rougissaient dans le vent du silence,
L'aube qu'on attendait sous ces feux de clarté,
Les matins qui doraient la vie et l'existence
Des cortèges du temps sous ces soleils d'été.
V
Mais le destin semblait conspirer quelque chose.
Quelque chose de noir approchait lentement,
Quelque chose confus comme un songe morose
Qui traversait le vide en rêve éblouissant,
VI
Etrange conscience au gouffre du mystère,
Etrange l'univers, étrange le ciel bleu,
Etranges la pâleur et l'ombre de la terre. . .
O l'étrange infini et son souffle de dieu!
VII
Or dans les vents brillaient les roses de lumière
Plus fort que le bonheur, plus fort que les chagrins,
Quand le chat renonçait à sa vie éphémère,
Lui qui savait aimer plus fort que les humains.
VIII
Dans le flot de la nuit ou brûlaient les orages,
Nos poèmes d'enfant que sont-ils devenus?
Les cyclones de mort et leurs souffles sauvages,
Ont-ils tout emporté de tout ce qui n'est plus?
IX
Et le poète fuit dans la nuit qui murmure.
Pour le faire arrêter, faut-il le mettre aux fers?
L'enivrer puis jeter la voile et sa blessure
Pour les requins rôdeurs aux fantasmes des mers?
X
Oui la mort est cruelle et tout tombe en poussière.
Rien ne reste toujours et tout fini un jour,
Le bonheur, le malheur, la vie et la misère
Et même l'univers, la conscience et l'amour.