La lune au ciel brillait calme et mystérieuse
Reflétant son image aux ondes du ruisseau
Au travers des taillis sa clarté dédaigneuse
Glissait comme un regret sur l'ombre d'un tombeau
Tout dormait dans la nuit quand un fantôme étrange
Passa comme un oiseau effleurant les moissons
Il avait le mystère et la grâce d'un ange
Descendre des cieux noirs au penchant des vallons
Je le vis disparaître au profond des ténèbres
Mais il semblait sourire aux choses d'ici bas
Et ses yeux n'avaient pas les tristesses funèbres
Des spectres expirants aux portes du trépas
Je restais confondu devant ce doux mystère
Etait-ce le présage annonçant les douleurs
Ou bien l'ange du rêve en ce lieu solitaire
Descendu pour chanter l'hymne sacré des coeurs
Une voix arrêta la marche du silence
Le fantôme drapé dans un grand manteau vert
Avançait dans la nuit chantant une romance
Et rêveur, j'écoutais son étrange concert
Il s'assit près de moi au sein de la Nature
Pour causer me dit-il. « Je suis venu ce soir
As-tu souffert hélas d'une longue torture
Ton coeur a-t-il aimé et vu s'enfuir l'espoir
As-tu pleuré les jours aux règnes éphémères
As-tu vécu la joie ainsi que le plaisir
Dis-moi pauvre mortel pleurais-tu les chimères
Dont tu gardas peut-être un trop cher souvenir »
Hésitant, sous ses yeux, j'ouvris un livre rose
Il lût de mon passé les fragiles amours
« Courage, me dit-il, une métamorphose
Va changer dons ton coeur le mal des anciens jours
Une épouse saura adoucir ta souffrance
Et soutenir encor ton espoir affaibli
Dans les jours de tristesse il est une espérance
Qui brillera pour toi dans son regard ami »
Je compris que l'amour souriant à ma vie
Etait venu dans l'ombre en sons harmonieux
Griser de mes projets la tendre rêverie
Et calmer la douleur d'un passé malheureux
Tout dormait dans la Nuit quand le fantôme étrange
Partit comme un oiseau effleurant les moissons
Il avait le mystère et la grâce d'un ange
Volant d'un libre essor au penchant des vallons.